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a péri de vieillesse, et cela est si vrai, que les plaques de gypse qui avaient servi à revêtir ses antiques murailles ont été, quand ce palais tombait de vétusté, reprises pour être employées aux revêtemens du palais neuf ; par économie de temps, on s’est borné à les retourner, en engageant dans la maçonnerie en brique crue les bas-reliefs primitifs. Ainsi donc, à Nemroud, M. Layard a retrouvé un palais mort sur pied de vieillesse, et dont les débris ont servi à reconstruire le palais moderne, qui date lui-même de six siècles au moins avant l’ère chrétienne. Dans le palais moderne de Nemroud, même arrangement qu’à Khorsabad, même système de bas-reliefs et d’inscriptions. Dans l’autre palais, que le feu n’avait pas anéanti, ont été retrouvés des fragmens nombreux d’armes et d’ustensiles en bronze et en ivoire, dont l’étude pourra servir à pénétrer plus avant dans cette civilisation assyrienne qui se révèle à nous après tant de siècles d’oubli. Une des plus belles conquêtes de M. Layard est une sorte d’obélisque de pierre noire et dure, parfaitement conservé et haut de quelques mètres. Sur les quatre faces de cet obélisque sont représentées des scènes guerrières, dans lesquelles figurent des animaux qui ne se retrouvent que dans l’Inde. Des textes cunéiformes accompagnent ces représentations, et ces textes, qu’on lira un jour, serviront sans doute à reconstruire quelques belles pages de l’histoire assyrienne. Déjà Londres a reçu un certain nombre de bas-reliefs enlevés au palais de Nemroud par M. Layard ; tous sont d’une admirable conservation, et ils sont à bon droit mis au rang des plus précieux ornemens du British Museum, où tant de trésors étaient déjà accumulés.

Le musée assyrien du Louvre, après avoir été ouvert aux curieux pendant quelques journées du mois de mai dernier, sera dans quelques semaines définitivement livré au public. Deux salles du rez-de-chaussée ont été consacrées à recevoir tout ce qui a été rapporté de Khorsabad. Embarquées d’abord sur des keleks, sorte de frêles radeaux soutenus par des outres gonflées, à l’aide desquels se font tous les transports sur le Tigre, les caisses contenant ces précieux débris ont été conduites à Bassora, où un bâtiment de la marine royale est allé les chercher par un ordre exprès du roi. Vers le commencement de l’année 18147, ce bâtiment arrivait au Havre, et, peu de semaines après, toutes les caisses étaient transportées au Louvre.

Dans la première salle, les quatre murailles ont été revêtues de larges encadremens en maçonnerie, dans lesquels des bas-reliefs sont venus prendre place. Quelques-uns de ces bas-reliefs ont malheureusement subi l’action dévorante du feu : ce sont ceux qui représentent des scènes maritimes. De nombreux bâtimens, conduits à la rame, transportent de fortes pièces de bois qui semblent destinées à servir à l’attaque d’une place forte construite sur un rocher. Des animaux aquatiques de toute espèce sont sculptés sur le champ de ces bas-reliefs : ce sont des crabes, des crocodiles, des serpens, des poissons et des coquilles. Parmi ces