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mais elles sont restées régulières, et leurs contours se raccordent-au plan qui les porte par des courbes toujours continues. Au contraire, le caractère essentiel du profil de l’Etna, considéré dans son ensemble, est la discontinuité des lignes. Entre les parties que nous avons désignées sous les noms de talus latéraux et de gibbosité centrale, il existe une bri sure très sensible. Il en est de même entre la gibbosité centrale et le cône terminal. Ces faits semblent à eux seuls assigner à ces diverses parties des origines différentes, et ont fait dire justement à M. de Beaumont que la connaissance approfondie des lignes de l’Etna était à elle seule presque toute une théorie.

L’examen des coulées nous conduit au même résultat. Rappelons d’abord quelques-unes des lois qui règlent leurs mouvemens. On comprend sans peine qu’une masse liquide ou de consistance visqueuse ne se comporte pas de la même manière sur des plans diversement inclinés. Rapidement entraînée sur une pente considérable, elle ne peut jamais acquérir sur cette pente l’épaisseur qu’elle atteindra sur une surface presque horizontale. Partout où la pente diminuera, la coulée s’épaissira ; partout où la pente augmentera, la coulée s’amincira. Par conséquent, pour qu’une coulée de lave présente sur une étendue considérable une épaisseur égale, il est nécessaire qu’elle coule sur une pente uniforme. Lorsqu’on examine les laves dont on connaît l’origine, on trouve toujours l’observation pleinement d’accord avec la théorie. Ces coulées ne laissent sur les pentes très inclinées qu’une traînée étroite et mince presque entièrement composée de scories, c’est-à-dire de portions déjà en partie solidifiées par le contact de l’air, tandis qu’elles s’accumulent en atteignant des talus à pentes douces, et y forment des couches épaisses et compactes. Ces faits très simples peuvent être vérifiés sur les coulées modernes qui sillonnent en tout sens le massif de l’Etna, et on en rencontre des exemples très fréquens sur la route de Nicolosi au cratère, un peu au-dessus de la Casa del Bosco.

Mais il n’en est plus de même lorsqu’on pénètre dans le Val del Bove, dans cette étrange et célèbre vallée qui porte écrite en caractères ineffaçables l’histoire de la formation du volcan. Ses escarpemens intérieurs se composent de plusieurs centaines d’assises alternativement formées par des bancs de roches et des couches de matières fragmentaires ou pulvérulentes. Ces substances, à peu près semblables, au premier coup d’œil, aux laves de l’époque géologique actuelle, présentent pourtant en général une teinte grisâtre, sur laquelle les coulées modernes se dessinent en noir. D’ailleurs elles sont, comme ces dernières, des roches de fusion, de véritables laves. Toutes ces assises sont parfaitement régulières. D’une extrémité à l’autre du val, c’est-à-dire sur une longueur de deux lieues environ, leurs bords présentent un parallélisme parfait, sans renflemens, sans étranglemens. Pour expliquer ce