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Ce relevé est publié pour la première fois. Lorsqu’il sera connu, les mêmes hommes qui reprochent à la direction de l’Algérie une prodigalité coupable ne manqueront pas de l’accuser d’une parcimonie outrée. Pendant dix-sept ans d’occupation, il n’a donc été fait que trente concessions au-delà de 50 hectares à des Européens et trois à des indigènes au service de la France. 17,234 hectares seulement ont été aliénés au profit de la grande culture. La répartition par province donne le résultat suivant :


hectares
Province d’Oran 11,317
- d’Alger 4,071
de Constantine 1,846

La province d’Alger emporte à elle seule plus des deux tiers : les donations les plus étendues et les plus nombreuses ont été récemment faîtes dans le triangle de M. de Lamoricière. La province de Constantine, qu’on a signalée en ces derniers temps comme la proie des agioteurs, ne présente que trois concessions de médiocre étendue, déduction faite des lots accordés à des chefs indigènes : la part des capitalistes y est dix fois moins grande que dans la province d’Oran, dont on ne dit rien. Quant à la province centrale, les deux tiers de la terre aliénée sont donnés aux trappistes, contre lesquels personne n’oserait réclamer ; à M. Borely-Lassapie, qui, établi au milieu de la Mitidja, donne à la colonie un exemple d’énergie dont elle a besoin ; à deux spéculateurs qui ont promis de fonder sur les côtes un village de pêcheurs, à un général qui a long-temps servi en Afrique. Aucun système exclusif ne prévaut : on écoute, on cherche, parce qu’on doute. Ainsi, un domaine qui comprend 7,040 hectares et englobe près de trois communes, est mis à la disposition d’une compagnie qui adopte le programme de M. de Lamoricière. Un riche propriétaire français, M. Dupré de Saint-Maur, se voue à la même œuvre et obtient 940 hectares. Un peu plus loin, 3,059 hectares d’une terre fécondée par le barrage du Si- sont livrés à un groupe qui paraît devoir se constituer sur des bases empruntées au système de Fourier. Dans le domaine de 600 hectares accordé à M. Ferdinand Barrot, on cherche le type de ce patronage du grand propriétaire qui doit, c’est l’idée en vogue, faire éclore autour de lui une population laborieuse, et en même temps un agronome inconnu, N. Milliot, obtient dans les broussailles de l’Edough 400 hectares, sous promesse d’entretenir pendant 15 ans au moins un troupeau modèle de bêtes ovines, composé mi-partie de sujets de race pure et de race indigène améliorée.

En résumé, les concessions rurales de toute nature, faites aux pauvres et aux riches sur le territoire français et sur le territoire arabe, ne donnent qu’un total de 52,000 hectares. La part des travailleurs a été