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d’Europe des nuées d’émigrans choisis parmi ce que l’ancien continent a de cultivateurs le plus animés de la louable ambition de conquérir un patrimoine à la sueur de leur front. S’il est au monde un pays d’où l’on pût attendre pour l’exportation une production de grains énorme, c’est celui-là. On sait ce qu’il a fait pour le coton. Il n’en donnait pas une balle en 1780 ; dix ans après, il n’en était encore qu’à 100,000 kilog. En 1800, il était parvenu à 8 millions de kilog. ; en 1820, à 42 ; actuellement il en est à 400[1], sans compter 50 ou 60 millions que le pays emploie dans ses propres manufactures. Rien de semblable cependant ne s’est passé pour le blé, quant à l’exportation ; l’excédant disponible est borné. La sortie du blé a été moyennement, pendant les quatorze années, du 1er janvier 1831 au 1er janvier 1845, de 2,001,000 hectolitres[2] ; mais, déduction faite des importations, car pendant cette période l’Amérique a été une fois dans la nécessité de tirer du blé du dehors[3], la prétendue inondation de l’univers par les blés d’Amérique se réduit à une moyenne de 1,840,000 hectolitres. Le maximum a été de 4,070,606 hect. en 1840. Les quatre premières années de cette période présentent une moyenne de 2,078,000 hectolitres. Les quatre dernières ne vont, l’une portant l’autre, qu’à 2,539,000. Ce n’est guère qu’un cinquième de plus. Ainsi, pendant cet intervalle de quatorze ans, la progression est très lente. Elle le serait bien plus, si l’on comparait aux quatorze années que nous venons d’embrasser un égal laps de temps à partir de 1790. On trouverait que les moyennes des deux périodes se ressemblent à 375,000 hectol. près[4]. Quant au prix, les cultivateurs d’Europe ont de ce côté-là moins à craindre que de tout autre endroit. Les prix courans de New-York accusent une cote constamment supérieure à 1 dollar le bushel, et moyennement, de 1830 à 1844, de 1 dollar 25. C’est, par hectolitre, un minimum de 15 fr. et une moyenne de 18 fr. 75 cent. Joignez-y le fret d’au moins 3 fr. par hectolitre, les déchets, les droits de commission, les frais d’embarquement et de débarquement, et vous verrez qu’il faudra des circonstances particulièrement

  1. Voir la statistique de M. Pitkin, page 111, et celle de M. Putuam, intitulée American Facts, page 197.
  2. Nous réduisons ici en hectolitres de grains la farine qui compose la presque totalité de l’exportation. La farine qui correspond à 2,001,000 hectolitres, d’après les procédés de mouture employés en Amérique, pèse environ 100 millions de kilogrammes.
  3. En 1837, il y eut une importation de 1,454,000 hectolitres contre une exportation de 585,561 hectolitres, ce qui donne pour l’importation une balance de 868,439 hectol. En 1838, l’Amérique du nord continua d’importer des blés, mais en moindre proportion, et l’exportation dépassa l’importation de beaucoup. L’importation des blés d’Europe en Amérique pendant les années 1835-36-37-38 est montée en tout à 2,140,652 hectolitres.
  4. La moyenne de l’exportation de la période de quatorze ans, du 1er janvier 1790 au 1er janvier 1805, est de 1,627,000 hectolitres. Voir la statistique de Pitkin, page 96.