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nous possédons déjà. Éclairé par la réflexion, par l’étude comparée de la nature vivante et des monumens antiques, M. Barye a compris la nécessité de sacrifier quelques détails de la réalité pour obtenir des masses plus faciles à saisir ; une fois résolu à marcher dans cette voie, il ne pouvait manquer de réussir, et il a réussi. Le lion que nous verrons bientôt aux Tuileries assure à M. Barye, d’une façon définitive, le premier rang parmi ceux qui traitent ce genre de sculpture. Son groupe de Thésée combattant le Minotaure, conçu dans le style éginétique, mériterait d’être exécuté pour la décoration d’une promenade publique. Je ne connais personne parmi les artistes contemporains qui puisse surpasser l’énergie et la simplicité de cette composition.

Parmi les gravures en taille douce, une seule m’a frappé : les Pèlerins de M. Jules François, d’après M. Paul Delaroche. Toute cette planche est exécutée avec une conscience, une exactitude scrupuleuse dont le peintre doit être content. Il est malheureux que ce tableau n’offre pas un plus vif intérêt ; le burin de M. François était digne de s’exercer sur une œuvre plus importante.

M : Laval a exposé six dessins très bien compris et très bien rendus, qui attestent chez ce jeune architecte des études persévérantes et sagement dirigées. La cathédrale de Ravello, l’autel de la Vierge par Orcagna, à Florence, sont des morceaux qui intéressent par la finesse de l’exécution ; M. Laval a su profiter habilement de son voyage en Italie. M. Eugène Lacroix a montré dans la restauration de l’hôtel-de-ville de Saint-Quentin un savoir étendu et varié. La façade est très ingénieusement recomposée. Le clocher ajouté par l’architecte est bien conçu. La partie supérieure a toute la simplicité qui convient aux constructions en bois et en plomb, si différentes, par le style, des constructions en pierre. Nous regrettons que l’auteur ait cru devoir ajouter à la base de son clocher des contreforts qui l’alourdissent inutilement. M. Lacroix accomplit dignement la mission qui lui a été confiée par le comité des monumens historiques et la ville de Saint-Quentin. L’hôtel-de-ville dont il entreprend la restauration est un des plus beaux monumens de la fin du XVe siècle. Il serait fort à désirer que tous les artistes chargés de travaux du même genre fissent preuve du même zèle, de la même intelligence, et comprissent, comme M. Lacroix, la nécessité absolue de respecter fidèlement le style et la donnée générale des œuvres d’architecture qu’on les prie de restaurer et non de corriger selon leurs vues personnelles.

M. Landron, dans la restauration du théâtre et du stade d’Aïzani (Asie mineure), s’est montré plein de sagacité. Il a retrouvé l’étage inférieur de ce monument, qui n’appartient pas à la grande époque de l’art grec, étage que M. Texier ne connaissait pas lorsqu’il a publié son travail. Les vomitoires ont une forme qui diffère de celle que leur avait