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nous en dehors de l’administration, comme en Angleterre. C’est un homme pratique, un administrateur des postes, M. Piron, qui, dès 1837, dans un travail aussi concluant que remarquable, en a signalé la convenance et démontré la possibilité. J’ajoute que cette mesure ne semblait pas devoir rencontrer ici, dans les régions administratives, la même résistance que de l’autre côté du détroit. D’une part, le revenu net que nous tirons des postes est beaucoup moins considérable : depuis plusieurs années, il n’excède pas 19 millions de francs, et en supposant qu’il fallût en sacrifier une partie, les ressources du trésor n’en seraient que faiblement atteintes ; mais il y a mieux, le gouvernement n’avait jamais reculé devant les dépenses ou les suppressions de recette qui pouvaient contribuer à l’amélioration du service. L’administration des postes semblait animée d’un amour du progrès qui tranchait sur la routine habituelle des bureaux. En moins de vingt-cinq ans, elle avait rendu le transport des dépêches quotidien dans toutes les directions principales. Vingt-huit malle-postes, dix-huit cents entreprises particulières, dix mille facteurs ruraux et vingt paquebots à vapeur transportent les lettres, les imprimés et les articles d’argent. Le service journalier des malle-postes sur toutes les lignes date du 1er janvier 1828 ; le service rural, du 1er avril 1830. Avant 1828, il fallait plus de dix jours pour avoir une réponse de Marseille ; les communications de Paris avec Toulouse demandaient cent dix heures, avec Bordeaux quatre-vingt-six, avec Strasbourg soixante-dix. A partir de 1828, la marche des courriers a été accélérée à ce point, que les malle-postes ne mettent plus que soixante-deux heures entre Paris et Marseille, pour une distance de 780 kilomètres, cinquante heures entre Paris et Toulouse (679 kilomètres), trente-six heures entre Paris et Bordeaux (distance, 566 kilomètres), trente-cinq heures entre Paris et Strasbourg, et dix-neuf heures entre Paris et Sédan (255 kilomètres).

Ces améliorations avaient sans doute entraîné une augmentation sérieuse dans les frais d’exploitation. Ainsi, l’établissement du service quotidien avait ajouté près de 3 millions de francs aux dépenses, et la création du service rural 3,500,000 fr. ; mais ces dépenses avaient été presque aussitôt couvertes par l’accroissement des produits. A la différence de l’Angleterre, le revenu brut de la poste, en France, a toujours été croissant. En 1830, il était de 30,754,000 francs, et en 1845 de 52,515,914 francs. La taxe des lettres entre Marseille et Paris, qui avait produit 110,000 francs en 1827, dix ans plus tard en donnait 229,000. Le nombre des lettres taxées ou affranchies a suivi une progression analogue ; il était de 64 millions en 1830 et de 116 millions en 1845. Dans la même période, le nombre des journaux et imprimés transportés par la poste s’était élevé de 40 millions à 70 millions par année.

Tout ce que l’on pouvait faire, en accélérant le transport des dépêches,