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L’Espagne était alors représentée à la cour des Tuileries par le prince de Masserano ; mais ce n’était point par ses mains que passaient les affaires les plus secrètes. Le véritable ambassadeur était un personnage obscur, entièrement dévoué au prince de la Paix, qui, sous le voile d’une mission scientifique, l’avait envoyé à Paris pour y défendre ses intérêts particuliers. Cet agent était don Eugenio Isquierdo. C’est lui qui reçut lez premières ouvertures relatives au démembrement du Portugal, qui en informa secrètement le prince de la Paix, et qui fut chargé par lui de discuter les hases du traité de partage. Le prince de Masserano n’en fut instruit qu’après que toutes les conditions en eurent été arrêtées. Le traité fut signé à Fontainebleau le 27 octobre 4807.

Le Portugal était divisé en trois lots. Le premier, formé des provinces d’entre Duero et Minho avec la ville d’Oporto, était donné au jeune roi d’Étrurie en échange de la Toscane, cédée à la France. Ce prince prendrait le titre de roi de la Lusitanie septentrionale. La province des Algarves et l’Alentejo composaient le second lot. Il était donné en toute souveraineté au prince de la Paix, qui prendrait le titre de prince des Algarves. Le nouveau royaume de la Lusitanie et la principauté des Algarves étaient placés sous la protection du roi d’Espagne. A défaut d’héritiers mâles du roi d’Etrurie et du prince des Algarves, le droit d’investiture, en ce qui touchait ces deux souverainetés, revenait à sa majesté catholique, sous la condition de ne les réunir ni sur une seule tête, ni à l’Espagne. Les trois provinces de Tras-os-Montès, de Beira et d’Estramadure, qui formaient le reste du Portugal, demeureraient en séquestre entre les mains de la France jusqu’à la fin de la guerre. Elles pourraient être alors restituées à la maison de Bragance, mais sous la condition que Gibraltar, l’île de la Trinité, ainsi que les autres possessions conquises par l’Angleterre sur l’Espagne depuis le commencement de la guerre, seraient restituées à sa majesté catholique. Les colonies portugaises seraient partagées également entre la France et l’Espagne. Le roi d’Espagne serait proclamé empereur des deux Amériques, et l’empereur des Français prendrait immédiatement possession du royaume d’Étrurie.

Une convention signée ce même jour, 27 octobre, régla le mode d’occupation du Portugal par les forces combinées des deux puissances. Une armée française forte de 28,000 hommes, dont 3,000 de cavalerie, à laquelle viendrait se joindre un corps de 11,000 Espagnols, se dirigerait, à travers l’Espagne sur Lisbonne. L’Espagne s’engageait à prendre possession de la province d’entre Duero et Minho avec 10,000 hommes, et de l’Alentejo et des Algarves avec 6,000. Un second corps d’armée français, fort de 40,000 hommes, se rassemblerait à Bayonne, de manière à se trouver en mesure d’entrer, le 20 novembre, en Espagne, dans le cas où les Anglais opéreraient une descente en Portugal ; mais il était