Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’ils avaient représenté sous Solon. On remarque à Rome une révolution analogue, lorsque l’on compare les premiers âges de la république à l’époque des premiers césars.

Que se passa-t-il lorsque l’empire vint à déchoir ? L’abondance des métaux précieux diminua peu à peu à Rome et dans l’Italie. Les tributs des provinces se réduisirent successivement. C’est de l’Orient qu’était venue la majeure partie de l’or ; mais il ne se présentait plus d’occasion pareille à la capture des trésors des rois de Macédoine, d’Arménie, d’Égypte, de Perse ou de Pont, et ce qui pouvait être transmis des provinces attenantes aux régions productrices de l’or, d’abord extrêmement amoindri, cessa complètement de s’acheminer vers Rome, quand il y eut un autre empire, avec Byzance pour capitale. Les présens qu’exigeaient les barbares faisaient sans cesse sortir de l’or. Les mines mêmes de l’Europe en rendaient moins. Les échanges avec le pays des épices et des parfums, où l’on n’avait aucun produit à expédier, causaient aussi une exportation continuelle de métaux précieux. Enfin, quand les barbares eurent envahi l’Italie, ils la pillèrent, et la masse des métaux qui y était en circulation se dispersa sur un plus grand espace. Au lieu d’une métropole unique qui absorbait tout, il y eut un grand nombre, un nombre presque infini de centres de puissance qui se disputèrent la richesse. Tant que dura le drame violent de l’invasion, et pendant les siècles de désordre et d’asservissement qui y succédèrent, ceux qui avaient de l’or ou de l’argent le cachaient avec soin. Une grande quantité de ces métaux fut ainsi ensevelie par des personnes qui voulaient mettre en sûreté tout ce qu’elles avaient de précieux ; et qui ensuite emportèrent leur secret dans la tombe. Cet usage d’enfouir des objets de prix se perpétua dans toutes les crises du moyen-âge, et on l’a pratiqué pendant notre révolution. Au moment de l’émigration, par exemple, beaucoup de richesses ont dû être enterrées par des gens qui comptaient les retrouver plus tard, bientôt, car les émigrés se flattaient d’un retour presque immédiat, et qui n’ont plus reparu. L’Occident, qui n’avait jamais produit que peu de métaux précieux, en comparaison de l’Orient, en mit au jour de moins en moins, parce que, dans ce chaos, sous ce règne de l’anarchie et de la brutalité, toute production se ralentit ou cessa ; les arts producteurs, dans ces temps barbares, se réduisaient à demander à la terre une grossière pâture. Cet effet dut se faire sentir plus particulièrement sur une industrie telle que celle des mines, qui exige beaucoup de suite et de prévoyance, non moins de sécurité, et ne peut s’accommoder d’un ordre de choses précaire. Le commerce avec les pays de l’Orient où l’on n’avait rien à envoyer, moins encore que Rome au temps de ses splendeurs, continuait d’enlever une partie de l’or ou de l’argent que conservait l’Europe. Les croisades elles-mêmes causèrent urne exportation assez forte dont il ne rentra rien. La piété des fidèles fit