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De lui seul et de Jean cette voix entendue
Remplit de longs échos l’invisible étendue,
Et, palpitant d’amour du nadir au zénith,
Dans son sein attentif l’univers la bénit.
Les germes non éclos de toutes créatures,
Les vieux morts attendant au fond des sépultures,
Les globes nouveau-nés et dans leur floraison,
Les anges, les Esprits d’amour et de raison,
Le cèdre et l’humble mauve en ses frêles corolles,
Tout a frémi d’attente au vent de ces paroles ;
Car, en montrant à Jean celui qu’il espérait,
La colombe annonça Jésus de Nazareth !

Faites silence, ô voix des prophètes, des sages ;
Descendez de votre aigle, ô porteurs de messages ;
Mourez avec la nuit, étoiles, pâles sœurs
Le vrai soleil éteint les flambeaux précurseurs
En rayons inégaux autrefois dispersée,
La lumière elle-même enfin s’est élancée,
Et le Verbe, que Dieu mesurait entre vous,
Est donné sans mesure à ce cœur humble et doux.
Donc, ô Jean, la plus grande entre les voix humaines,
Sagesse du désert, flot des douze fontaines,
Ton baptême finit sur ce front tout-puissant ;
Tu n’as plus sur la terre à verser que ton sang.


LIVRE TROISIEME.



I.


Les urnes, les trépieds, les flambeaux étincellent
Dans le festin d’Hérode, et les fleurs s’amoncellent.
Des hôtes accoudés les robes à longs plis
Jettent mille couleurs sur la pourpre des lits.
Les échansons, levant à deux mains les amphores,
Versent les vins mielleux ; les blanches canéphores,
Dans les paniers tressés d’argent flexible et fin,
Offrent les blonds gâteaux étalés sur le lin.
Les disques sont chargés de mets savans et rares.
Sur les tables de jaspe, en figures bizarres