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risques et périls. Les uns, — ce sont les meilleurs, — l’associent à leurs folies par pur élan de jeunesse, comme un joyeux compagnon pour lequel, au besoin, ils paieraient une dette d’hôtel garni, un voyage, un souper, une débauche à deux. D’autres, moins généreux et plus à craindre, l’envisagent au contraire comme une dupe de facile composition qui paiera tribut à ses initiateurs, et dont il est permis de rançonner l’innocence. Edward est bientôt la dupe de ces forbans. Ils le livrent pieds et poings liés à une espèce de vampire femelle, de juif en jupons, qui cumule les profits de l’usure avec ceux d’une table d’hôte. Une fois entre les mains de Mme Belzoni, Edward est perdu. Elle l’introduit auprès de certains banquiers de bas étage qui, sur sa fortune à venir, et moyennant la cession anticipée qu’il leur en fait, prêtent au jeune dissipateur une somme considérable. Ne vous étonnez pas de leur complaisance. Parmi les partners anonymes de la banque à laquelle Edward s’est adressé, figure Price Overley, le même que Barrington supplanta naguère, et le fils du tuteur infidèle dont Frankberry a déjoué la friponnerie. Price Overley ne laissera pas échapper l’occasion de vengeance que lui fournit, sans le savoir, Edward, le fils de son loyal ennemi.

Ce qui suit est facile à deviner : Edward est poursuivi pour les lettres de change qu’il a si imprudemment souscrites. Barrington, qui, toujours juste, s’attribue en grande partie les torts de ce fils si mal élevé, après avoir essayé d’amener à composition les usuriers dont Edward est victime, — les trouvant inattaquables devant les tribunaux, — se résigne à payer. Pour acquitter les dettes de son fils, il compte sur les 4,000 liv. placées chez le client de Frankberry ; mais il apprend alors que Frankberry, dilapidateur des deniers d’autrui, dépositaire infidèle, banqueroutier, voleur enfin à tous les degrés, vient de disparaître subitement. Le prétendu transfert d’hypothèque n’a jamais eu lieu. Les actes qui semblaient l’établir étaient l’œuvre d’un faussaire. Barrington est décidément ruiné. L’unique gage de ses créanciers, ou, pour mieux dire, de son créancier, — car Price Overley a seul le droit de se considérer comme tel, — est le petit domaine où le brave major comptait finir en paix sa calme existence, tout à coup si compromise. Vendre « les Jardins (the Orchards) » est une dure nécessité dont l’amour paternel ne saurait effacer toute l’amertume ; mais Barrington est bien décidé à ne pas reculer, puisqu’il s’agit de racheter l’honneur de son fils, l’intégrité de leur nom et l’avenir d’Edward qui, par son repentir, a mérité un entier pardon. Si la Providence n’intervenait, nous verrions s’accomplir là un très héroïque, mais très lamentable sacrifice. Par bonheur, au moment même où Price Overley va se faire adjuger « les Jardins, » on vient l’arrêter de par le lord-maire de Londres. Le