Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/999

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand on se met au galop, le grand William jette un regard ironique sur son pauvre commentateur, qui le suit douloureusement au trot de son grison,

Presque sans connaissance et cramponné à l’arçon de la selle, mais ; après sa mort comme pendant sa vie, suivant fidèlement pas à pas son auteur.

Il y avait aussi beaucoup de femmes dans cette folle cavalcade des esprits, surtout de belles nymphes au corps svelte et juvénile.

Elles étaient assises à califourchon sur leurs coursiers dans une complète et mythologique nudité. Seulement leurs cheveux dénoués ondulaient derrière elles comme des manteaux dorés.

Elles portaient des couronnes de fleurs sur leur tête, et, fièrement renversées dans des postures voluptueuses, elles brandissaient des thyrses bachiques.

A côté d’elles, j’aperçus quelques nobles demoiselles chastement vêtues et obliquement assises sur leurs selles de femme vertueuse ; elles portaient le faucon au poing.

Derrière, comme une parodie, chevauchait, sur de maigres squelettes de haridelles, une cohue de femmes parées d’une façon théâtrale.

Leur visage était joli à ravir, mais quelque peu effronté. Elles criaient comme des folles à faire tomber le fard dont leurs joues étaient peintes.

Comme tout cela retentissait joyeusement, sons du cor, rires éclatans, hennissemens des chevaux, aboiemens des chiens, claquemens des fouets ! Hallo et houssa !


XIX.

Mais au milieu de la troupe trois figures se détachaient, trois merveilles de beauté. — Jamais je n’oublierai ce trio d’amazones !

La première était facilement reconnaissable au croissant qui surmontait sa tête ; fière comme une belle statue sans tache, la grande déesse s’avançait.

La tunique relevée couvrait à demi la poitrine et les hanches ; l’éclat des flambeaux et la lumière de la lune jouaient voluptueusement sur ses membres d’une éclatante blancheur.

Son visage aussi était blanc comme du marbre, mais froid comme lui. La fixité et la pâleur de ses traits nobles et sévères faisaient frissonner.

Pourtant au fond de son œil noir brille un feu terrible, un feu doux et perfide qui aveugle et dévore.

Combien elle ressemble peu à présent à cette Diane qui, dans l’orgueil de sa chasteté, changea Actéon en cerf et le fit déchirer par ses chiens !