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sur les fers traités à la houille étant de 18 fr. 75 cent., plus le décime, c’est à 9 ou 10 francs qu’il pourrait être convenablement réduit, sans qu’il y eût lieu d’ailleurs de maintenir l’absurde distinction introduite entre les deux espèces de fers. Une telle réduction ne serait guère plus forte que celle qui fut admise en 1836, et dont l’expérience a montré les salutaires effets. C’est alors qu’on verrait les maîtres de forges s’occuper réellement de perfectionner leurs méthodes. Les moindres progrès réalisés dans ce sens suffiraient amplement pour couvrir la différence des prix.

Si un tel changement devait être difficilement supporté quelque part, ce serait tout au plus en Champagne, à cause des conditions particulièrement défavorables où sont actuellement placées les usines de cette contrée, et parce que la marge du progrès réalisable y semble moins forte qu’ailleurs. Toutefois la gêne qui pourrait en résulter ne serait jamais que passagère : elle cesserait aussitôt que ce pays entrerait en possession des voies de communication qu’il attend. Or, les plus importantes de ces voies, en cours d’exécution depuis plusieurs années, touchent à leur terme. Il ne faut pas croire d’ailleurs qu’une réduction de 8 ou 9 francs sur les droits actuels entraînerait immédiatement une réduction égale sur les prix ; l’effet en serait neutralisé en partie par une hausse à l’étranger. « Le jour, disait M. Ferrier, où un seul quintal de fer anglais pourra se présenter avantageusement sur notre marché, l’Angleterre nous en enverra pour quatre ans. » Avec plus de justice, nous pouvons dire : Le jour où l’Angleterre, aussi bien que la Belgique., pourront nous envoyer des quantités un peu notables de fers, les prix s’élèveront promptement sur les marchés de ces deux pays. Et ceci n’est pas une hypothèse, car l’expérience a été faite plus d’une fois, sinon par la France, au moins par d’autres pays, et elle a toujours en son infaillible effet. Lorsque l’Amérique fit à l’Angleterre des commandes un peu fortes pour l’exécution de son réseau de chemins de fer, commandes fort éloignées pourtant d’égaler la consommation annuelle de la France, les prix s’élevèrent, sur le marché anglais, à 26 et 29 francs le quintal métrique, pour retomber ensuite à 19 francs lorsque ces commandes furent remplies. Pareillement, lorsque la convention relative aux fers fut conclue entre le Zollverein allemand et la Belgique, les prix, qui n’étaient précédemment que de 18 francs à peine dans ce dernier pays, s’élevèrent promptement à 26 et même 28 francs. Un semblable effet se produirait sans aucun doute si la France se résolvait seulement à entre-bâiller ses portes. La baisse des prix sur nos marchés n’égalerait donc pas à beaucoup près la réduction opérée sur les droits. Il est probable même qu’elle n’en excéderait pas la -moitié. Or, il n’y a guère de forges en France qui ne puissent se mettre promptement en mesure de supporter une diminution