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se complique. Les deux questions, celle de l’agriculture et celle des mines, se touchent ; aussi, pour arriver à une solution satisfaisante et complète de l’une et de l’autre, faudrait-il les aborder en même temps. Ainsi se justifie de nouveau ce que nous avons dit en commençant, que tout se tient en industrie, et que, pour réformer sans effort et sans trouble notre régime présent, il ne faut pas procéder à cette réforme par actes successifs, mais la pousser à la fois, bien que graduellement, sur plusieurs lignes parallèles.

En supposant même que le prix du bois eût baissé, ensuite de la réduction des droits sur les produits agricoles, il ne descendrait jamais, nous le savons, au niveau du prix de la houille, au moins dans les lieux où ce combustible abonde ; mais il faut dire aussi que, dans la fabrication du fer, l’efficacité du charbon de bois est plus grande, qu’il en faut une moindre quantité en poids pour obtenir un effet égal. Si nous prenions à cet égard pour points de comparaison le travail au bois des forges de la Champagne et le travail à la houille des forges du nord, nous trouverions des différences surprenantes. Ainsi, dans un grand nombre de ces dernières, et notamment à Anzin, on a souvent consommé 330[1] kilogrammes de combustible pour produire 100 kilogrammes de fer, tandis que, dans les forges de la Champagne, on n’en consomme en général que 124 kilogrammes pour obtenir un résultat égal. Il s’en faut de beaucoup, il est vrai, que cette extrême inégalité dans les consommations dérive uniquement de la différence des combustibles employés ; il faut faire une large part d’abord à l’imperfection du travail dans les forges du nord, puis à la qualité inférieure des fontes qu’elles emploient ; il est incontestable pourtant que dans la fabrication du fer, toutes choses égales d’ailleurs, 100 kilogrammes de charbon de bois produiront plus d’effet utile que 100 kilogrammes de houille.

C’est surtout dans la production de la fonte que le charbon de bois offre d’incontestables avantages. La fonte qui en provient est plus douce, plus pure, plus maniable, meilleure enfin, et, comme elle se travaille plus facilement que celle qui a été produite à l’aide du combustible minéral, elle permet d’obtenir une économie assez notable dans les travaux subséquens. On sait, du reste, qu’elle vaut ordinairement sur le marché 2 ou 3 francs de plus au quintal métrique. À ce point de vue, les forges travaillant au bois ne seraient pas aussi menacées qu’on le suppose. Elles pourraient surtout conserver une partie fort importante de leur travail actuel, la production de la fonte, en laissant aux usines

  1. C’était là, en 1844, le travail normal des forges du nord. Nous avons lieu de croire qu’il s’est un peu amélioré depuis deux ans. Remarquons, du reste, qu’il ne s’agit ici que de la conversion de la fonte en fer.