d’une convention homologuée le 29 mai 1827, l’état s’est engagé à tenir le plafond du canal à deux mètres au-dessous du niveau de la mer, jusqu’à l’écluse de l’Étourneau, située à 20 kilomètres du rivage dans l’intérieur des terres ; le débouché des eaux de la plaine étant approfondi, la succion des eaux des marais environnans est devenue bien plus énergique : 3,000 hectares qu’elles couvraient ont été mis au jour, et 4,000 autres, qui ne produisaient que des joncs et des roseaux, convertis en bons pâturages ou en terres arables. Une valeur territoriale de sept à huit millions a de la sorte été conquise sur les eaux, la salubrité du pays a fait de nouveaux progrès, et l’extension du domaine de l’agriculture a compensé les mécomptes éprouvés sur la navigation. A la vérité, les charges ont été pour les contribuables et les profits pour quelques particuliers ; mais la richesse nationale n’en a pas moins augmenté, et les premiers n’ont point trop à se plaindre quand on ne place pas plus mal leur argent.
Tels sont les principaux changemens survenus depuis une quarantaine d’années dans l’état physique de cette région. Il est peu surprenant que le système d’administration locale des marais, établi dans d’autres temps, s’adapte mal à un état de choses si différent de celui pour lequel il a été combiné : aussi n’y a-t-il qu’une voix sur ses imperfections ; mais, quels que soient les vices du régime actuel, ils ne pouvaient pas empêcher les prodiges opérés par le creusement du canal de frapper vivement les esprits et d’ouvrir les yeux des propriétaires sur les richesses que recélaient les marais voisins. De nouvelles associations n’ont pas tardé à se former : dès 1835, on préparait le projet du desséchement des 1,400 hectares du marais des Baux, à l’est d’Arles ; les travaux, évalués à 1,200,000 fr., sont aujourd’hui en cours d’exécution, et l’impulsion donnée ne s’arrêtera point là.
Ce n’est pas, du reste, seulement par l’abaissement du niveau des eaux que se crée dans les environs d’Arles un nouveau territoire agricole ; en dévastant en 1840 et 1841 sa vallée, en rompant ses digues en aval de Tarascon, le Rhône lui-même est venu contribuer à cette œuvre ; à la place d’une récolte qu’il emportait, il déposait un champ. Ses eaux limoneuses se sont naturellement étendues sur les terrains les plus bas ; elles y ont perdu leur vitesse et s’y sont dépouillées des terres qu’elles entraînaient : l’épaisseur des dépôts est à peu près proportionnelle à la profondeur des eaux troubles ; sur plusieurs points, elle a atteint 30 centimètres. Ainsi rehaussé, le sol est devenu d’autant plus facile à dessécher, et si de grandes colmates étaient préparées d’avance pour recueillir les atterrissemens que les crues du Rhône portent chaque année à la mer, la fertilité des bas-fonds de l’arrondissement d’Arles deviendrait bientôt proverbiale, comme l’est aujourd’hui leur insalubrité.