Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/574

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


Séparateur


31 janvier 1847.


La pratique du gouvernement représentatif, tout en étant favorable à la paix, porte inévitablement une certaine agitation dans les relations diplomatiques. Entre des peuples qui ont une tribune, toute guerre qui n’aurait pour elle ni la nécessité ni la justice est impossible. Quand le bon sens public et l’intérêt général ont la parole et disposent du budget, il est interdit à qui que ce soit d’entraîner un pays sans son aveu dans de périlleux hasards. C’est là un des principaux bienfaits du régime constitutionnel, et en même temps, néanmoins, la publicité des débats politiques tient de peuple à peuple les esprits en éveil, et leur inspire une susceptibilité qui va parfois jusqu’à l’irritation. Si on interroge au fond les dispositions de la France et de l’Angleterre à l’égard l’une de l’autre, on les trouve plus pacifiques que jamais. Assurément, des deux côtés, on tient plus à la paix qu’il y a seize ans. On en a constaté tous les avantages, et tous les intérêts en ont fait entrer la durée dans leurs calculs ; mais ce n’est pas tout que de conserver la paix : on entend aussi l’exploiter à son profit, et surtout n’y pas trouver de mécomptes. Lorsque la France apprit la convention du 15 juillet 1840, lorsqu’un an après elle eut connaissance du traité relatif au droit de visite, elle protesta vivement, et non sans raison. Cependant, en 1843, en 1844, les deux gouvernemens échangèrent d’éclatantes démonstrations de bienveillance et d’amitié. Aujourd’hui, est-ce vraiment le tour de l’Angleterre de se plaindre de nous ? Sans la séparer de son gouvernement, tout en reconnaissant que le ministère whig est en ce moment le représentant légitime de la Grande-Bretagne, il est permis d’affirmer que les récriminations consignées dans les dépêches de lord Palmerston ne sont pas l’expression d’un ressentiment national. S’il en était autrement, n’eussions-nous pas trouvé dans le discours prononcé par la reine d’Angleterre, à l’ouverture des chambres, un indice, un écho des sentimens du peuple anglais ? Si la nation n’eût pas été si indifférente, le cabinet whig eût été moins réservé.