Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/413

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La production a été régulière dans toutes les branches, l’écoulement des produits s’est jusqu’à ce jour opéré d’une manière satisfaisante, et les effets que la Banque a dans son portefeuille sont excellens. Ce ne sont pas nos capitalistes non plus qui courraient des aventures comme celles des Anglais en 1825, se précipitant aveuglément sur les mines d’or et d’argent du Nouveau-Monde, ou qui commettraient des hardiesses semblables à celles que presque chaque instant voit éclore aux États-Unis. Il n’y a donc pas jusqu’à présent de crise commerciale ou manufacturière qui soit imminente ; de même nous n’avons pas à prévoir un dérangement dans les finances de l’état. On a pu croire un moment que l’entreprise des chemins de fer entraînerait une perturbation. Il est facile de voir maintenant que cette frayeur était chimérique. Dans les proportions où elle s’est réduite par l’ajournement des chemins de fer de l’Ouest, de Caen et de Dijon à Mulhouse, l’œuvre des chemins de fer n’est aucunement au-dessus de nos forces. Les titres de chemins de fer ont baissé parce que les effets publics sont en baisse, ainsi qu’on doit s’y attendre lorsque survient une cherté des subsistances. Alors la création du capital se ralentit : les hommes vivent sur leurs épargnes antérieures, et le capital existant enchérit, c’est-à-dire qu’à un revenu déterminé correspond dès-lors un moindre capital nominal, et par conséquent les fonds publics doivent être cotés moins haut. Si la dépression des actions de chemins de fer a été plus forte proportionnellement que celle des rentes, c’est par cette cause générale que l’enchérissement du pain agit avec plus d’intensité sur les titres les plus nouveaux et sur ceux d’un produit plus incertain, et, probablement aussi, par cette cause accidentelle, que les joueurs à la baisse se sont trouvés les plus nombreux et ont fait un plus grand effort. Les actions cependant ne sont pas avilies : fait qui paraît constant et qui serait curieux, elles sont même peu offertes. Les personnes qui observent avec le plus de discernement les opérations de la Bourse soutiennent que les titres de chemins de fer sont plutôt rares qu’en excès, et elles en donnent pour preuve la modicité du taux des reports. Le système de la fusion, sur lequel on a tant controversé, a eu le résultat avantageux de diviser beaucoup les actions : ainsi réparti entre un nombre infini de mains, le fardeau se trouve aisé à porter. Le capital des compagnies de chemins de fer s’est composé, pour une bonne part, d’une foule de petites épargnes qui cherchaient un placement et d’écus enfouis. Les fonds que les compagnies ont présentement entre les mains, avec le supplément à verser en juin, suffiront à leurs dépenses pour un long espace de temps. Par conséquent, nous n’avons pas non plus de crise de chemins de fer.

Il est digne de remarque qu’au moins jusqu’à ce jour la tenue de la bourse de Paris a été plus ferme que celle de toutes les autres bourses de l’Europe. Les rentes françaises ont moins baissé proportionnellement