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facilité aux industriels pour les aider à passer les mauvais jours, et surtout ne recevoir que des effets à deux mois, lorsque l’habitude de tout le commerce est de faire ses règlemens à quatre mois, ce seraient là de graves déterminations, qui augmenteraient la crise au lieu de la diminuer. Il nous semble qu’on pourrait engager la Banque à prendre des mesures plus efficaces pour obvier à la rareté du numéraire, et continuer ses escomptes, sinon dans des proportions plus libérales, au moins sur le même pied. Le grand vice de l’organisation de la Banque est dans la création facultative de ses nombreux comptoirs. Depuis vingt ans, son capital est resté le même qu’au temps où elle n’avait pas établi ses succursales de province. Elle aurait dû, lors de ces formations nouvelles, augmenter son capital, ou vendre au moins, au fur et à mesure de ses besoins, des rentes en quantité suffisante pour faire le fonds de roulement de ses nouveaux comptoirs. Or, la Banque a encore à elle 2,500,000 francs de rente, comme autrefois, lorsque ses opérations embrassaient la seule place de Paris. N’y a-t-il pas là des ressources dont le moment est venu de faire usage ?

Cependant, tout en constatant le trouble général, il faut se garder de se laisser aller à des craintes exagérées, surtout quand nous voyons que la Banque a pris au moins quelques mesures prudentes destinées à faire entrer dans ses coffres le numéraire qu’elle pouvait redouter de voir lui manquer. Un de ses régens est allé à Londres dernièrement négocier un achat de lingots, qui seront payés en traites à trois et six mois. Cet achat a produit 20 millions d’espèces, et l’on assure que le traité a été conclu pour 80 millions, qui seraient versés au fur et à mesure de ses besoins.

C’est avec regret que nous constatons combien la cherté du pain a influé sur les versemens dans les caisses d’épargne. Dans les premiers jours de janvier 1845, la caisse d’épargne recevait 1,150,000 francs, 1,000,000 francs en 1846, 800,000 francs seulement en 1847. Voilà une irrécusable et triste preuve du malaise qui règne dans quelques classes de la société.