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infraction à ses principes. Au reste, la seconde restauration le vit sans fléchir fidèle à son rôle de modération énergique et conciliatrice. Nouvellement rétabli, s’étant mieux mis en garde contre les hommes de l’ancien régime, le gouvernement, sous la direction de M. de Talleyrand à l’extérieur et de M. Pasquier à l’intérieur, annonçait des dispositions plus douces pour les vaincus et plus favorables aux principes de la révolution. M. Royer-Collard soutint vivement la loi d’amnistie. Il combattit l’élection à deux degrés, qui, en paraissant accorder à la nation une part plus considérable par l’augmentation des électeurs, pouvait devenir un puissant instrument entre les mains des privilégiés par leur influence sur les classes inférieures ; mais l’œuvre capitale de M. Royer-Collard, à cette époque, l’œuvre qui suffirait à elle seule à fixer son nom dans l’histoire, c’est la part immense qu’il prit à la réorganisation de l’Université.

Le 15 août 1815, M. Royer-Collard, associé à MM. de Sacy, Frayssinous et Cuvier, fut nommé président de la commission d’instruction publique.

Fondée par la loi de 1806, organisée par le décret du 17 mars 1808, l’Université de France avait été abolie par une ordonnance royale du 17 février 1815. Mieux éclairée, mais ne pouvant encore se détacher de ses préventions défavorables, la seconde restauration prit un moyen terme. L’Université fut maintenue, mais le grand-maître supprimé et le conseil royal d’instruction publique aboli. La puissance exécutive du premier et le pouvoir délibératif du second se trouvèrent concentrés entre les mains d’un comité d’instruction publique. M. Royer-Collard, pensant que cette accumulation de pouvoirs ne serait qu’un empêchement à l’action de l’Université, se porta pour le défenseur de l’ancienne hiérarchie. Il soutint une double lutte et contre les ennemis de l’Université, qui, revenant à la charge, voulaient qu’elle cessât de faire un corps, et contre ses partisans trop tièdes, qui consentaient à la laisser mutiler. Aux prétentions de M. Lainé, qui demandait à la réduire aux proportions d’une simple division de l’intérieur, aux censures de M. de Villèle, il opposa cette belle définition que l’Université, c’est l’état appliqué à la direction générale de l’éducation publique. Il eut raison de toutes les résistances. Le 1er septembre 1820, la commission prenait le nom de conseil royal d’instruction, et le 1er juin 1822 voyait rétablir le titre et les attributions du grand-maître.

Autant de temps que le gouvernement de la restauration fit preuve de quelque sagesse et parut consentir à supporter la liberté, M. Royer-Collard se montra un de ses dévoués serviteurs. Quand M. Decazes vint proposer la loi nouvelle sur la suspension de la liberté individuelle comme un adoucissement apporté à celle du 29 octobre 1815, qui devait