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animaux, des crustacés, des annélides, des médusaires. A certains temps de l’année, et probablement à l’époque où l’accomplissement des fonctions reproductrices exige une surabondance d’activité vitale, ces êtres microscopiques acquièrent la propriété d’exprimer en quelque sorte de la lumière à chaque contraction musculaire un peu énergique. C’est là, du moins, ce que j’ai cru pouvoir conclure de nombreuses observations faites sur les côtes de Bretagne et de Normandie. M. Ehrenberg, de son côté, pense que les noctiluques, petit rayonné très commun dans le port du Havre, possèdent, comme les lucioles, un organe spécial chargé de produire la lumière. Enfin tous les pêcheurs savent que les méduses, les béroés et plusieurs mollusques laissent suinter de leurs corps une matière luisante dans l’obscurité, comme le bois mort ou le poisson pourri. Ici, le phénomène est dû sans doute à une combustion lente. Cependant une observation, recueillie par MM. Audouin et Milne Edwards, pourrait jeter du doute sur cette explication. Ces naturalistes ont vu la liqueur phosphorescente des pholades couler au fond d’un vase d’alcool, s’y amasser sans perdre de son éclat et former une couche lumineuse. On voit que bien des phénomènes très différens ont été confondus sous cette dénomination commune de phosphorescence, et que cette curieuse question est loin d’être complètement résolue.

Après avoir passé le reste de la nuit à l’ancre en face de Stromboli, nous partîmes le lendemain pour Messine. Cette traversée de près de vingt lieues ne fut pas entièrement perdue pour nos études. M. Edwards et moi commencions à nous aguerrir, et, par un temps calme, ne redoutions plus le mal de mer. Aussi, tandis que M. Blanchard mettait de l’ordre dans ses boîtes, piquait et étiquetait les insectes recueillis à Milazzo et sur le Stromboli, nous tendions la traîne ou arrêtions au passage tout être vivant qui se hasardait à la portée de nos filets à main. Nous pêchâmes ainsi plusieurs larves curieuses, des annélides, des crustacés pélasgiques, quelques médusaires curieux, entre autres des vélelles. Ce joli zoophyte, qui rappelle sous plus d’un rapport l’organisation des méduses proprement dites, possède aussi ses caractères bien tranchés. Son ombrelle, de couleur bleu foncé et garnie en dessous de nombreux suçoirs, est renforcée en dessus par des plaques cartilagineuses renfermant une certaine quantité d’air, tandis qu’une lame de même nature, implantée verticalement sur les premières, croise obliquement le dos de l’animal. Maintenues à fleur d’eau par le gaz qu’elles ont sécrété, et poussées par le vent qui heurte comme autant de voiles leurs lames verticales, les vélelles flottent souvent en grand nombre à la surface des vagues. Nous ne rencontrâmes, il est vrai, aucune de ces flottilles animées, mais seulement des individus isolés. Nous recueillîmes aussi plusieurs jantines, charmant petit mollusque dont le corps, renfermé dans une coquille d’un violet tendre, est suspendu à