Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 17.djvu/1169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou un seul navire de cette espèce, le Rattler, a été expérimenté. Si nous signalons ces critiques de sir C. Napier en ce qui concerne la marine à vapeur, c’est que cette marine est particulièrement celle sur laquelle se portent l’attention et le vif intérêt du pays. Tout le monde, en France, comprend cette marine-là et y met un secret espoir. C’est à ces sentimens qu’il faut attribuer l’émotion qu’ont causée plusieurs sinistres arrivés à des bâtimens à vapeur français dans un assez court espace de temps. Ces événemens sont regrettables, et ceux qui arrivent aux Anglais n’en consolent point. La fréquence de ces sinistres doit certainement avoir des causes dans la nature même de cette navigation. Il serait peu raisonnable de s’en prendre seulement à la capacité des officiers, puisque ces mêmes officiers n’ont pas aussi souvent la chance contraire sur les navires à voiles, qui, en apparence du moins, sont plus difficiles à diriger. Les hommes spéciaux s’accordent à dire que, si, dans certaines circonstances, la navigation à la vapeur offre de grandes facilités, dans d’autres elle est si délicate, qu’elle demande toute la vigilance, toute la capacité d’un homme de mer consommé. Du reste, le département de la marine procède aujourd’hui à une enquête sérieuse. Une commission, présidée par un vice-amiral et composée de six capitaines de vaisseaux, examine en ce moment la question.

Il est évident, pour qui considère aujourd’hui dans son ensemble la politique extérieure de l’Angleterre, que le plus grand désir du cabinet britannique est d’user partout de tempéramens et de ne s’engager nulle part d’une façon trop compromettante. Quelle que soit l’arrière-pensée qu’on puisse chercher sous cette prudence, quels que soient même les écarts qui viennent parfois la déranger, il n’en est pas moins vrai qu’elle est à l’ordre du jour. Le dernier débat introduit à la chambre des communes par M. Hume, au sujet de Cracovie, a bien prouvé qu’on était décidé à n’avoir point d’affaires.

En 1815, par un traité conclu entre l’Angleterre, la Hollande et la Russie, les deux premières puissances s’obligèrent vis-à-vis de la troisième à payer annuellement une somme qui, pour la part de l’Angleterre, s’élevait à 120,000 livres ; l’Angleterre avait pris cette charge en considération des accroissemens territoriaux qu’elle avait acquis aux dépens de la Hollande. La régularité du paiement était subordonnée au maintien de l’intégrité du royaume-uni des Pays-Bas ; c’était en quelque sorte le prix de la garantie spéciale que la Russie donnait à l’état de choses fondé par les traités de Vienne dans cette partie de l’Europe. Lorsque la révolution de 1830 eut enlevé la Belgique à la Hollande, le gouvernement anglais ne voulut point se prévaloir, pour rompre le contrat, d’un événement qui s’était accompli sans la Russie et contre la Russie ; il renouvela le traité et consentit, suivant les termes primitifs, à supporter jusqu’en 1915 cette charge annuelle de 120,000 livres, mais à la condition inverse de celle qu’il avait exigée en 1815 ; la Russie promettait sa garantie non plus à l’union, mais à la séparation des deux royaumes. « Dans toutes les questions relatives à la Belgique, elle devait identifier sa, politique à celle que l’Angleterre avait jugée la plus sûre pour la conservation de l’équilibre européen. » De son côté, la Russie avait sollicité dans ces nouvelles conventions une stipulation moins étroite qui lui assurât sa créance hollandaise, quels que fussent les nouveaux accidens qui pourraient intervenir sur l’Escaut ; il était dit que l’Angleterre regardait ce paiement comme obligatoire « à raison des arrangemens généraux du congrès de Vienne, auxquels la Russie avait donné son adhésion, ces arrange-