siècle, en effet, une pareille combinaison a été considérée comme favorable à la paix européenne, et l’expérience a prouvé qu’elle n’avait jamais été contraire à l’indépendance de la monarchie espagnole. En général, la discussion de l’adresse au sein des cortès a été remarquable tant par le talent de quelques orateurs que par la liberté sans licence qui a présidé aux débats. L’Espagne commence à comprendre l’esprit du gouvernement représentatif, à ne plus confondre le droit de contradiction avec la révolte, ou l’amour de l’ordre avec le despotisme. Le parti progressiste a pu parler sans contrainte ; on a rendu justice au talent de M. Cortina. En attaquant les principaux actes de l’ancien ministère, les orateurs progressistes ont provoqué deux excellens discours de MM. Mon et Pidal. Avec un esprit moins positif, avec une imagination que l’étude des affaires n’a pas encore assez calmée, M. Donoso-Cortès a captivé le congrès par sa brillante parole. Les idées qu’il a développées ne sont pas toutes d’une exacte justesse. Il se trompe à coup sûr, et on le lui a dit même au sein du congrès, quand il voit l’Espagne menacée par l’établissement des Français en Afrique, qu’il compare, sous ce rapport, à la domination de l’Angleterre en Portugal ; mais nous sommes moins sensibles à ces erreurs de détails qu’à la noble énergie avec laquelle M. Donoso-Cortès a protesté contre la singulière prétention de lord Palmerston, qui voudrait arracher à l’infante, à Mme la duchesse de Montpensier, une renonciation au trône d’Espagne, comme si cette princesse pouvait renoncer aux droits de ses enfans, de ses successeurs. Un parlement espagnol aurait seul le pouvoir de prononcer une semblable renonciation. Outre les orateurs déjà connus, quelques hommes dont l’avenir doit agrandir la situation, comme M. Benavides, ont pris part au débat. Quant au ministère, il a plutôt fait preuve de bonnes intentions que de force suffisante, et sa chute est attendue d’un instant à l’autre. M. le duc de Sotomayor, qui préside le cabinet, a insisté sur l’efficacité que doivent avoir les mesures prises par le gouvernement, qui demande aux cortès la double autorisation de lever cinquante mille hommes et de contracter un emprunt. Toutefois, ni lui ni ses collègues n’ont, aux yeux de la représentation nationale et du pays, l’autorité morale que réclament de plus en plus les circonstances. C’est moins que jamais le moment de rejeter sur le second plan les principaux chefs du parti modéré, pour laisser agir les hommes secondaires. Nous n’exagérons pas les dangers que peuvent créer à l’Espagne les entreprises du parti carliste : Tristany, avec sa bande, a été sur plusieurs points repoussé par les populations ; pas un des généraux un peu connus qui ont guerroyé pour la cause de don Carlos n’a voulu se compromettre. Le prétendant est loin de songer à une descente en Espagne, car on annonce qu’il a l’intention de se produire de plus en plus dans les salons de l’aristocratie anglaise ; néanmoins l’attitude du parti carliste est pour le gouvernement espagnol une cause d’embarras qui appelle une vigilance active. Il y a en outre les difficultés intérieures. La reine Isabelle est jeune, elle a de l’inexpérience ; elle a besoin d’être entourée de conseillers d’un mérite éprouvé, capables d’exercer sur ses déterminations une influence qui sache se faire accepter. Si en ce moment la reine Marie-Christine revient à Paris, c’est que ses avis n’étaient plus accueillis avec la même déférence qu’autrefois, et elle a préféré à une présence devenue inutile une absence de quelques mois, qui pourra plus tard éveiller des regrets et provoquer un retour de confiance.
Athènes est devenue, comme Madrid, une sorte de champ clos pour les deux