les habitudes militaires jadis universellement répandues dans le pays. Depuis la rupture des capitulations avec la France, ces habitudes sont presque perdues dans les cantons protestans, mais elles se maintiennent en partie dans les états catholiques, les seuils qui fournissent encore à des puissances étrangères un contingent de quelque importance[1]. Dès ce temps, à la tête du gouvernement lucernois siégeait un homme nouveau, d’un caractère versatile, d’une ambition sans scrupules, et qui, dans les années précédentes, avait dirigé le parti démocratique avec une singulière énergie de langage et d’action, M. l’avoyer Siegwart-Müller.
La lutte dont la Suisse entière attendait l’issue avec anxiété s’engagea le 1er avril ; ce jour-là, les corps francs, après avoir, en plusieurs colonnes dont la force totale n’excédait pas quatre mille hommes, traversé sans difficulté la partie occidentale du territoire de Lucerne, se présentèrent sans ordre et sans concert devant les hauteurs qui couvrent la ville ; quelques dispositions intelligentes avaient été prises en cet endroit par M. de Sonnenberg. La ferme contenance des bourgeois enrégimentés, mais surtout l’adresse et la vigueur des montagnards des cantons primitifs accourus à l’appel de leurs confédérés firent le reste. La défaite des aventuriers fut prompte, complète et même sanglante ; ils perdirent près de deux cents hommes, mille autres demeurèrent prisonniers, et il fallut les racheter par une rançon de plus d’un million de francs, que les cantons délinquans, dont ils ressortissaient, versèrent dans les caisses de Lucerne comme indemnité pour les frais de cette courte guerre. Il n’y eut heureusement, après la victoire, aucune exécution capitale, et l’abattement du parti démagogique prouva bientôt aux catholiques de la Suisse orientale que l’arme naguère dirigée contre eux s’était complètement brisée dans les mains qui l’avaient forgée ; mais avec l’excès de la confiance l’orgueil et l’ambition passèrent alors du camp radical dans les rangs opposés.
Depuis près de deux ans, les cantons catholiques dans lesquels prévalait l’intérêt ecclésiastique montraient une tendance prononcée à concerter leurs efforts, tant pour défendre le terrain qu’ils occupaient encore que pour regagner celui qu’ils avaient perdu ; mais, après l’attaque de Lucerne par les corps francs, les négociations entre les plénipotentiaires des sept états[2] devinrent plus actives et furent dirigées vers un but plus précis. Non-seulement la diète refusait de revenir