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Cependant les patriotes, suspectant la bonne foi ou la puissance du cardinal avaient exigé, avant de se rendre, que la signature du capitaine Foote leur garantît, mieux encor e que les otages du fort Saint-Elme, la fidèle exécution de ce traité. Le capitaine du Seahorse y engagea son honneur et celui de son pays. Il ne pouvait, d’ailleurs, conserver aucun doute sur les pouvoirs dont il était revêtu en cette circonstance.- « Le roi, écrivait Nelson au comte Spencer le 1er mai, a fait connaître par une proclamation quels étaient les républicains qui seraient exceptés d’une amnistie générale, mais tout individu, fût-ce le plus grand rebelle, à qui Troubridge aura dit : Ton crime t’est pardonné, sera sauvé par ce seules paroles. » Le capitaine Foote, héritier des pouvoirs du capitaine Troubridge, n’eût donc pu, sans une obstination inexplicable, refuser sa garantie au traité que venait de conclure le vicaire-général du royaume.

Déjà, en effet, les otages étaient échangés, les hostilités suspendues, et le pavillon de parlementaire arboré sur les forts républicains comme à bord de la frégate le Saahorse, quand Nelson parut à l’entrée de la baie. Il apprit, avant de mouiller, les conditions qui venaient d’être accordées aux rebelles. À cette nouvelle, il témoigna une douloureuse surprise et déclara que c’était la un infâme armistice qu’il ne ratifierait jamais. Le capitaine Foote reçut l’ordre, par signal, d’amener le pavillon de parlementaire arboré au mât de misaine de sa frégate, et, le 28 juin, Nelson fit connaître au cardinal Ruffo sa résolution de s’opposer à l’exécution de cette capitulation, jusqu’au moment où elle aurait reçu l’approbation du roi de Naples. Sa détermination, fortifiée par les éloges de sir William et de lady Hamilton, fut dès-lors inébranlable. En vain le cardinal vint-il à bord du Foudroyant défendre avec une noble énergie l’engagement sacré qu’il avait reçu de son souverain le droit de souscrire, comme le capitaine Foote avait reçu de son commandant en chef le droit de le ratifier, en vain ce dernier fit-il observer à Nelson que, lorsqu’il avait garanti des conditions aussi favorables aux rebelles, il devait plutôt s’attendre à voir arriver dans la baie de Naples la flotte française que l’escadre anglaise ; en vain lui représenta-t-il qu’en présence d’une telle éventualité, il n’avait pu se croire le droit de se montrer plus exigeant que le cardinal : Nelson, tout en rendant pleine justice à ce qu’il appelait les bonnes intentions du capitaine Foote, n’en persista pas moins à soutenir qu’il avait été la dupe de « ce misérable Ruffo, qui cherchait à créer à Naples un parti hostile aux vues de son souverain ; » le 28 juin, il se débarrassa de ce censeur incommode en l’envoyant à Palerme, avec l’ordre d’y mettre sa frégate à la disposition de la famille royale. Cependant, le 26, après avoir, conformément au neuvième article de la capitulation, relâché quelques prisonniers d’état, parmi lesquels figuraient le frère du cardinal Ruffo et dix soldats anglais