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droite de l’armée napolitaine a été repoussée, « pour ne pas dire pis, » ajoute Nelson ; mais Mack et Ferdinand IV sont entrés à Rome. Championnet, averti à temps, a évacué cette ville et concentré ses forces sur les bords du Tibre, entre Cività-Castellana et Cività-Ducale. La confiance de la cour de Naples commence à chanceler, et Nelson, qui l’a confirmée dans ses imprudens projets, n’est pas éloigné lui-même de partager ses craintes :

« En peu de mots (écrit-il au comte de Saint-Vincent, le 6 décembre 1798), voici quel est l’état de ce pays : l’armée est à Rome, Cività-Vecchia est occupée ; mais, dans le château Saint-Ange, les Français ont encore 500 hommes. Ils en ont 13,000 dans une position très forte appelée Castellana Le général Mack marche contre eux avec 20,000 hommes. Dans mon opinion, l’issue de ce combat est douteuse et d’elle seule dépend le sort de Naples. Si Mack est battu, ce pays-ci, en moins de quinze jours, est perdu, car l’empereur n’a pas encore ébranlé son armée, et, s’il ne se met en marche, ce royaume n’est point en état de résister aux Français. Mais il n’y avait point de choix à faire. C’est la nécessité qui a contraint le roi de Naples à prendre l’offensive, au lieu d’attendre que les Français eussent rassemblé des forces suffisantes pour le chasser en une semaine de son royaume. »

Les prévisions de Nelson ne tardent point à se réaliser. La plus belle armée de l’Europe s’est évanouie au seul bruit du canon. Battu sur les bords du Tibre, Mack n’essaie point retarder les progrès de l’ennemi ; il se croit environné de traîtres, et, plus prompt encore dans sa retraite que dans la marche inconsidérée l’a porté jusqu’à Rome, il dépasse Velletri, où Charles III avait battu les impériaux en 1744, Gate, que le maréchal Tsehiudy livre sans combat à Macdonald, le Garigliano, dont les eaux gonflées auraient couvert ses troupes, et ne s’arrête qu’à sept lieues de Naples, sur la ligne du Voltune et sous les remparts de Capoue. Dans la précipitation de sa fuite, 7,000 soldats sont restés en arrière. Ce sont des Napolitains, comme ceux qui se sont fait battre si indignement à Fermo, à Castellana, à Terni ; mais ceux-là ont un homme de cœur à leur tête, un émigré français, le comte Roger de Damas, et, bien que poursuivis par les troupes de Championnet, coupés par celles de Kellermann, ils s’ouvrent un passage vers les états toscans et vont s’embarquer à Orbitello. Cependant la terreur de la cour est déjà à son comble. Le 11 décembre, Ferdinand IV est arrivé à Caserte, suivi de près par les troupes françaises, et, depuis trois jours, ni l’ambassadeur anglais, ni Nelson, n’ont pu pénétrer auprès de la reine ; « mais les lettres qu’elle adresse à lady Hamilton, écrit l’amiral au comte Spencer, peignent toute l’angoisse de son ame. » - « Les officiers napolitains, dit-il, n’ont pas perdu beaucoup d’honneur, car Dieu sait qu’ils en avaient bien peu à perdre, mais ils ont perdu tout ce qu’ils en avaient… Mack a vainement supplié le roi de faire sabrer les fuyards. Il a lui-même, dit-on,