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s’opposaient en principe et en fait aux développemens de la marine transatlantique belge. En échange d’espérances irréalisables, la marine belge gagne même à ce traité des avantages positifs pour son cabotage ; mais enfin, bien ou mal entendu, ce rêve d’une marine transatlantique était le dernier abri du système d’isolement, et il s’est évanoui au souffle de ces mêmes intérêts manufacturiers dont l’intelligent concours avait secondé, deux ans auparavant, les prétentions des armateurs anversois. Il était dit que pas un élément de la coalition protectionniste ne sortirait intact de cette réaction si brusque et si imprévue : le même traité accorde des privilèges à l’importation des poissons et des bestiaux des Pays-Bas.

Vaincues ensemble, vaincues séparément, vaincues l’une par l’autre, toutes les exigences protectionnistes sont donc venues échouer contre les nécessités douanières issues de leur accord, et, par cet enchaînement de mécomptes qui est la logique des idées fausses, les efforts tentés pour sauver en partie le principe de la loi des droits différentiels n’ont servi qu’à compléter sa ruine. De ce complot d’isolement si patiemment et si longuement élaboré, de ces échecs soudains, de ces désertions inattendues, de ces résistances suprêmes aussitôt paralysées que nées, qu’est-il en définitive sorti ?

Un traité allemand et une convention française qui constatent l’impuissance de deux industries créées et protégées dans le dessein avoué de repousser la France.

Deux guerres de tarifs qui ont eu pour résultat : d’abord d’anéantir pour nos voisins la possibilité d’une marine transatlantique, seule éventualité qui, plus tard, put détourner de nous celles des industries belges qui vivent par la France ; ensuite de reporter toute l’activité de la marine belge vers le cabotage, c’est-à-dire vers l’alliance des pays voisins, et, au premier rang, de celui que bordent deux mers, la France.

Une loi enfin qui, en faisant d’Anvers l’entrepôt des marchandises anglaises et allemandes, force le commerce belge à refluer plus que jamais vers le continent, et, dans le continent, vers le marché qui offre les plus grands avantages de proximité, de dissemblance industrielle et d’étendue : vers la France.

Si la France n’a pas mis à profilées résultats, si, au renouvellement de la convention de 1842, elle a obtenu moins que la Prusse et la Hollande, c’est qu’elle l’a bien voulu ; mais la force des choses se charge déjà de suppléer à notre légitime initiative, et c’est du peuple flamand, du foyer même de cette influence ultramontaine dont la France était le grand épouvantail, que la réaction française a surgi.

Tout devait mal tourner dans le projet favori des catholiques. La colonie de Guatemala, destinée à recevoir un jour le trop plein des