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de l’Angleterre : British Consuls abroad. On peut voir là combien nos voisins attachent d’importance et de sérieux à des fonctions que nous laissons trop souvent remplir au hasard. Lord Palmerston disait en 1842 que « tout le temps qu’il avait passé au ministère il lisait lui-même chaque rapport et chaque dépêche des représentans du pays à l’étranger, depuis le travail développé du plus élevé des consuls-généraux jusqu’à la lettre la moins essentielle du dernier des vice-consuls ; la correspondance consulaire entrait pour une moitié dans la correspondance du Foreign-Office ; si laborieuse que fût cette lecture, il y trouvait, continuait-il, beaucoup de matières très graves qu’il était de son devoir de connaître. » Quelques passages du livre, auquel ces paroles servent de préambule, montrent assez Ï’intérêt que doivent offrir parfois les rapports des moindres agens de l’Angleterre. Après avoir rappelé tous les privilèges légaux des consuls, l’auteur ajoute : « Il est encore beaucoup d’avantages personnels que le consul peut s’approprier, quoiqu’ils n’affectent point son office ; il vaut donc mieux laisser à son bon sens le soin de les découvrir et d’en user avec discrétion, plutôt que de les énumérer comme les précédens. » La réticence est, comme on voit, passablement ambitieuse. N’oublions pas enfin d’ajouter que l’Algérie, dans ce livre presque officiel, est toujours réputée, régence barbaresque, et que les consuls-généraux d’Alger, de Tanger, de Tunis et de Tripoli reçoivent chacun 1,600 liv. d’appointemens, comme ceux d’Alexandrie et de Constantinople. En Angleterre, plus encre qu’ailleurs, les chiffres sont significatifs.

La situation du Portugal est devenue plus critique, sans que rien se soit encore décidé dans un sens ou dans l’autre : les légers succès remportés par les troupes de la reine nous semblent plus funestes qu’heureux, s’ils l’ont encouragée à proclamer sa dictature absolue. La reine se montre en public avec quatre de ses enfans, pendant que le roi Ferdinand, revêtu de son nouvel uniforme de commandant-général, passe en revue les régimens qui lui restent et les citadins improvisés soldats. Lisbonne, capitale de la cour, s’obstine cependant à ne point répondre aux démonstrations par lesquelles on s’efforce de gagner les esprits. La révolution, installée en grand appareil à Oporto, a élevé gouvernement contre gouvernement ; le comte das Antas avance toujours. L’amiral Parker a mouillé dans le Tage, et M. Gonzalès-Bravo vient de rentrer en Portugal. Voilà l’intervention étrangère toute prête à côté de la guerre civile. Nous avons appris avec plaisir que M. de Varennes était retourné à son’poste ; ce sera du moins une raison pour qu’en Portugal on n’accuse plus la France de cacher sa diplomatie.

Le mouvement de Genève se communique partout en Suisse ; Bâle travaille à réformer sa constitution. L’élément radical a beau se mêler dans toutes ces agitations politiques, nous persistons à douter qu’il l’emporte et prenne la haute main à Genève ou à Bâle, comme à Berne ou à Lausanne. La fortune de ces deux derniers cantons repose particulièrement sur la propriété foncière, et le radicalisme peut encore remuer beaucoup avant d’avoir ébranlé ce solide fondement. Perorer dans les cafés et organiser des clubs ou des comités, ce n’est point porter une grande atteinte à la richesse territoriale ; perdre ainsi le temps et l’ordre, ce serait ruiner l’activité commerciale qui fait toute la prospérité de Bâle ou de Genève, dont la richesse consiste presque uniquement en capitaux. Voilà comment il arrive que le nouveau gouvernement genevois s’est prononcé si vite