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encyclopédique que nous reprochent les étrangers, et qui n’est bonne qu’a embrouiller les questions les plus claires, à nous éloigner sans cesse des applications pratiques, en nous jetant dans les phrases et les doutes, à compromettre même les plus graves intérêts.

Ce mouvement d’expansion sur le globe entier, qui signale notre époque, ces courses des voyageurs, ces études des géographes, devaient nécessairement réagir sur les sciences naturelles, et de nouveaux centres se sont formés sous le titre de Société de géologie, Société entomologique, Société cuvierienne. La Société de géologie, qui compte aujourd’hui quatre cent quatre-vingt-dix-sept membres, tant en France qu’à l’étranger, a pour objet de travailler au progrès général de la science, et surtout d’étudier le sol de la France dans ses rapports avec les arts industriels et l’agriculture. Cette société, dont la constitution est essentiellement démocratique, admet dans son sein, sans épreuves et sans titres préalables, toutes les personnes qui désirent s’associer ; il suffit d’être présenté par deux membres, et de payer, après réception, la somme annuelle de 30 francs. Le Bulletin, qui reproduit les procès-verbaux, les communications verbales ou écrites, les discussions scientifiques, les analyses d’ouvrages étrangers, forme un recueil de quatorze volumes, plus cinq volumes de Mémoires renfermant les travaux originaux. La société s’occupe en ce moment, pour clore la seconde série de son bulletin, d’un compte-rendu des progrès de la géologie pendant les dix dernières années. S’il est un reproche que l’on puisse avec raison adresser à cette compagnie, ce n’est point d’avoir négligé de populariser la science, mais plutôt de la compromettre en la vulgarisant outre mesure.

La Société entomologique, fondée en 1832 sous les auspices de Latreille, s’occupe exclusivement des crustacés, des arachnides, des insectes, qu’elle étudie au point de vue de l’anatomie, de la physiologie, de la zoologie, des mœurs, et enfin dans leurs rapports avec les arts, l’économie domestique, et surtout l’agriculture. Ses Annales, ornées de planches, la plupart coloriées, forment une série de quatorze volumes, au milieu desquels se trouvent dispersés, à côté d’études souvent minutieuses, quelques travaux fort estimables. Quant à la Société cuvierienne, contrefaçon fort imparfaite de l’académie allemande des Curieux de la nature, son existence n’est guère révélée au public que par la publication d’un recueil intitulé la Revue de zoologie, et, si nous sommes bien informé, il suffit, pour en devenir membre, de s’abonner à ce recueil, comme il suffisait, il y a quelques années, de s’abonner au Journal des connaissances utiles, quand on voulait faire partie de la Société pour l’émancipation intellectuelle.

Quoi qu’il en soit de l’étendue et de la variété du programme de ces diverses compagnies savantes, quels que soient aussi les hommes qui figurent parmi les membres, on se tromperait en mesurant à la lettre même des statuts et au nom des titulaires l’importance des travaux. Parmi les associés, la plupart de ceux qui occupent dans la science un rang vraiment éminent, se laissent enrôler par complaisance ; ils sont là pour donner du relief, comme les pairs de France dans les sociétés des chemins de fer, et ils se bornent à payer la cotisation, comme un impôt indirect prélevé sur leur gloire. Les amateurs, les aspirans à l’Institut, les candidats échoués, forment en général la majorité des membres actifs. Il faut cependant excepter de cette remarque la Société philomatique. Fondée en 1788, cette société, qui a compté parmi ses travailleurs les plus assidus Sylvestre,