moins diabolique que la première, notre homme pendit son chat, son pauvre chat noir, déjà éborgné par lui.
Par une fatalité singulière, le jour suivant, sa maison brûla. L’incendie fit crouler toutes les murailles, sauf une seule, fraîchement replâtrée. Sur celle-là, qui offrait une surface parfaitement lisse et blanche, la foule, accourue pour vérifier les ravages du feu, contemplait avec étonnement, — et le propriétaire avec horreur, — l’image d’un chat noir, dessinée, pour ainsi dire, en relief. Ce chat ne pouvait être que Pluton, témoin la corde passée à son cou, et dont on retrouvait l’empreinte sur ce fantastique médaillon.
Sans doute, — car nous ne croyons plus aux miracles, — le chat, détaché de l’arbre où il était pendu, avait été jeté dans la maison, par quelque mauvais plaisant, dès le début de l’incendie, et la chute de quelque plancher l’avait collé contre la muraille neuve, où il était resté pendant que la maison brûlait. Au moins est-ce de la sorte que peut s’expliquer ce décalque si extraordinaire.
Quoi qu’il en soit, le fantôme de Pluton, depuis cette scène fatale, hanta le cerveau dérangé de son assassin, qui cherchait une occasion d’expier son crime, lorsqu’il rencontra, certain soir, dans un cabaret où il passait la nuit, un autre chat, noir comme Pluton, et qui parut recevoir avec un plaisir singulier les caresses dont il l’accablait. En achetant ce chat, qui le suivit très volontiers, le pauvre fou crut apaiser les mânes de sa victime. Hélas ! le lendemain, quand il examina son nouvel hôte au grand jour, le malheureux s’aperçut que, comme Pluton, ce chat était borgne. Cette coïncidence presque inexplicable lui donna pour l’animal une aversion toute naturelle, et qui, semblable de tout point à la première, s’amassait, croissait, s’envenimait chaque jour.
Pour la faire mieux comprendre, il faut ajouter encore que sur sa noire fourrure ce malheureux chat avait une tache blanchâtre, — la seule différence qui le distinguât de son prédécesseur, — et que cette tache, d’abord assez indécise dans ses contours, avait fini par prendre, — au moins notre ivrogne la voyait-il ainsi, — la forme très distincte et très nette d’une potence. C’était là, pour une imagination malade, une sorte de pronostic funeste.
Nonobstant toutes ces causes de haine, l’homme, sa femme et le chat vécurent quelque temps sans querelles ; la femme aimait singulièrement le chat, le chat aimait l’homme ; l’homme craignait le chat, et n’aimait guère la femme. Ajoutez à ces fâcheuses dispositions les mauvais conseils de la misère, — malesuada fames, — et les sanglantes chimères que l’ivrognerie suscite dans un esprit malade ; vous comprendrez ce qui suivit.
L’homme descendit un jour à la cave, escorté de sa femme et de son