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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 décembre 1846.


Sans disparaître, sans avoir encore reçu de solution, les difficultés diplomatiques vont momentanément faire place aux préoccupations parlementaires. Quand les gouvernemens constitutionnels ont pris de grandes résolutions, ils n’ont accompli que la moitié de leur tâche, car il leur reste à les justifier devant les chambres ; si autrefois la politique extérieure s’attachait à cacher ses procédés et ses moyens, elle est aujourd’hui contrainte, par le régime représentatif, de divulguer après coup ses intentions, ses ressorts, et de fane à la tribune son apologie. Cette nécessité, qui sans doute eût paru fort étrange aux hommes d’état des temps passés, est, à notre époque, pour les gouvernans un de leurs devoirs les plus laborieux, et en ce moment elle crée à la France et à l’Angleterre une situation épineuse. Il va s’engager entre les deux tribunes de Londres et de Paris un dialogue, une lutte, qui rappelleront, avec certaines différences, ce qui s’est passé en 1840. Il y a six ans de l’Angleterre ; aujourd’hui c’est le gouvernement anglais qui prétend avoir contre nous les griefs les plus fondés. S’il fallait en croire les amis de lord Palmerston, celui-ci serait en mesure de prouver que dans la question d’Espagne il est sans reproches, et que tout le mal est venu de la précipitation du gouvernement français. La brusque pétulance de notre diplomatie aurait surpris le ministre whig au milieu de ses bonnes intentions à notre égard ; s’il avait eu un moment la pensée d’une combinaison qui devait nous déplaire, il allait y renoncer volontairement, quand la conclusion du double mariage a tout tranché avec une promptitude et une hardiesse dont il nous croyait incapables. C’est surtout cet imprévu que lord Palmerston ne nous pardonne pas, et sur lequel en Angleterre les hommes éclairés, ceux qui sont restés partisans de l’alliance des deux pays, attendent et désirent des explications satisfaisantes. De l’autre côté du détroit, les esprits calmes et sages reconnaissent qu’au fond la question espagnole n’a pas, pour le présent surtout, l’importance extraordinaire