et les preuves qu’ils ont recueillies ne permettent de douter ni de son intelligence à comprendre les devoirs d’un bon citoyen ni de son courage à les remplir ; mais les parties obscures de ses œuvres sont laissées dans l’ombre, les raisons secrètes de ces railleries énigmatiques qui ne pourraient être expliquées que par une connaissance approfondie des différens partis d’Athènes et du caractère politique de la comédie, sont passées sous silence au lieu d’éclairer l’opinion par des vues nouvelles, ils se contentent de glorifier l’Aristophane banal qui a cours dans les collèges. Peu disposés à croire que le théâtre d’un peuple spirituel fût une institution de calomnie subventionnée par le trésor public, quelques critiques ont supposé que le Socrate des Nuées était une création arbitraire, affublée au hasard d’un nom historique. Si bizarre que soit cette hypothèse, M. Grothe a voulu la discuter, et il a facilement montré que des allusions continuelles et des ressemblances de position la rendaient inadmissible ; mais il n’explique pas non plus les plaisanteries trop contraires aux croyances reçues et aux récits habituels des historiens pour ne pas autoriser quelque incertitude : il néglige même d’indiquer les raisons morales qui, lorsque Aristophane avait sous la main tant de méchans philosophes, le poussèrent à choisir précisément Socrate. M. Forchhammer est entré résolument au cœur du sujet ; il range tout d’abord Socrate parmi les révolutionnaires et appelle ses adversaires les conservateurs ; c’est même là le seul mérite de sa brochure : cette heureuse idée est si mal développée, qu’elle semble plutôt l’aperçu d’un pressentiment que le résultat d’une étude réfléchie. Quoique Socrate affectât de ne point s’occuper de matières politiques, le caractère de sa philosophie était essentiellement factieux, et, au lieu de mettre en relief la nature anti-athénienne et les tendances subversives de ses doctrines, M. Forchhammer appuie ses accusations sur quelques faits peu significatifs en eux-mêmes, et peut-être mal interprétés. Aussi, dans une réponse indigne de son savoir et de sa renommée, M. de Limburg-Brouwer a-t-il pu facilement réunir des faits contraires dont il exagère à son tour les conséquences. Tant de sentimens divers se disputent la direction de la vie, que la plus systématique se laisse aller à de nombreux écarts, et, en généralisant ces exceptions, on arrive à démentir les vérités historiques les plus incontestables : c’est avec cette mauvaise foi d’avocat que Linguet manipula les témoignages de Suétone et de Tacite, et en fit sortir l’apologie de Néron. La brochure du Savant hollandais n’est que la thèse d’un docteur en bonnet carré du XVIe siècle, avec tous ses anachronismes, une conviction de parti pris, un ton de supériorité outrecuidante, et les violences d’un langage plein d’acrimonie. Sous prétexte d’étudier l’influence des sophistes sur leurs contemporains, M. Baumhauer a patiemment recueilli un grand nombre de faits curieux pour l’histoire littéraire ; il a classé chacun à sa
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