Égypte non seulement les idées fondamentales de l’émanation des dieux et des ames humaines du sein de Dieu, mais encore une foule de théories accessoires, avec tous les emblèmes qu’y rattachait l’antique mystériosophie. »
Il faudrait d’abord prouver que les idées qu’on croit retrouver dans le gnosticisme appartiennent réellement à l’ancienne religion de l’Égypte. C’est ce qui sera très facile, si on laisse à cette religion tout cet ensemble de notions abstraites que lui ont prêté les Alexandrins, Plutarque, et, d’après eux, les modernes ; mais si l’on s’en tient aux monumens égyptiens, seule source qui ne soit point suspecte, on aura quelque peine à y rien trouver qui ressemble à la doctrine de l’émanation et à toutes les subtilités métaphysiques du gnosticisme. Quelques idées réellement égyptiennes offrent bien une véritable analogie avec des conceptions gnostiques ; mais la plupart, comme la purification des ames après la mort ou leur chute dans un ordre d’existence inférieure, se trouvant ailleurs qu’en Égypte ont pu être empruntées par les gnostiques aux spéculations de la philosophie grecque ou aux dogmes des religions orientales[1] : la provenance égyptienne est donc loin d’être assurée, là même où elle est possible. Elle n’acquiert un grand degré de probabilité que quand, au lieu d’une ressemblance générale qui ne prouve aucun rapport certain, on rencontre une identité de détails ou de noms que le hasard ne peut produire.
Mais ces identités sont en bien petit nombre[2], et l’on peut avancer hardiment que ce qui a dominé dans le gnosticisme et en particulier dans le gnosticisme alexandrin, c’est la spéculation platonicienne mêlée à quelques rêveries de la cabale juive et peut-être à quelques dogmes persans. L’unité inconnue d’où tout émane et qui tantôt s’appelle Abîme, tantôt s’appelle Silence chez les gnostiques ; les manifestations de cette unité dans une série descendante de puissances, et le retour de ces manifestations à leur ineffable principe ; la matière conçue comme ce qui limite
- ↑ Ainsi l’adoration du serpent par les Ophites peut certainement avoir un rapport réel avec le choix du symbole égyptien par lequel on désigne la divinité dans les peintures et les hiéroglyphes, et qui est le serpent Uréus, ou avec le serpent à ailes et à pieds que l’on voit représenté dans les rituels funèbres ; mais le serpent est par partout, dans les mythologies et les cosmogonies de l’Orient, et on ne peut être assuré que le serpent des Ophites soit égyptien plutôt que juif, persan, indien, etc.
- ↑ Je citerai les génies qui résident aux diverses parties du corps, selon certains gnostiques, ce qui est tout-à-fait dans les idées égyptiennes, comme le prouve l’inscription hiéroglyphique qui accompagne la momie de Petemenoph (Champollion, Voyage de Caillaud, t. IV, p. 37). Les génies des sphères. (Matter, II, 237), qui ont des têtes de lion, de serpent, etc., et ressemblent singulièrement à des personnages qu’on voit figurer dans les représentations astronomico-funèbres des tombeaux de Thèbes, enfin quelques noms des êtres dont se compose le pléroma, sont bien égyptiens, comme Athumes, Emphe. Ce dernier nom est celui d’une divinité égyptienne. L’Horos des Valentiniens paraît bien rappeler Horus.