au moins d’une pensée mûre. Est-ce dans de telles conditions qu’elles se présentent ?
Quand on considère l’incohérence de tous ces plans, leurs variations continuelles, les interprétations si diverses qu’ils reçoivent et les contradictions flagrantes qu’on y rencontre, on demeure convaincu que ceux qui les proposent ne savent bien ni où ils vont ni ce qu’ils veulent. Sont-ils sûrs de la rectitude de leurs vues ? prévoient-ils d’avance les résultats de leurs mesures ? Avant toutes choses, sont-ils d’accord ? Loin de là : on ne voit que confusion dans leurs idées, entraînement aveugle dans leur marche, désaccord perpétuel dans leurs volontés et dans le but qu’ils se proposent. De tant d’hommes qui professent le principe des restrictions, il n’y en a pas deux qui en entendent l’application de la même manière, il n’y en a pas un qui ne trouve beaucoup à reprendre dans le système établi. Écoutez seulement ce qu’ils en disent : le principe est bon, s’écrient-ils, il ne s’agirait que d’en modifier l’application. Tel est en général leur langage. Bien hardi serait d’ailleurs celui qui oserait approuver tout ce qui est. Or, ce langage même n’est-il pas la plus haute condamnation du principe qu’ils invoquent ? Comment comprendre qu’ils osent forcer les hommes à abdiquer leur libre arbitre au profit de ces idées discordantes, de ces systèmes en lutte ?
Certes, en considérant les choses de ce point de vue, on peut demander aux fauteurs des restrictions un compte sévère de leurs tendances et de leurs actes. Ils violent le droit, c’est évident ; ils privent la masse des consommateurs de l’avantage du bon marché, c’est plus évident encore ; ils interdisent aux particuliers des transactions profitables, des marchés avantageux, d’ailleurs inoffensifs : voilà les résultats les plus clairs de l’application de leurs doctrines. C’est bien le moins qu’ils fassent toucher au doigt les avantages qu’ils offrent en compensation de tant de pertes.
Mais les rôles sont changés. Ce n’est pas aux fabricateurs de systèmes que l’on demande compte des résultats de leurs plans ou de la rectitude de leurs doctrines, c’est aux partisans de la liberté, aux défenseurs du droit. On va chercher péniblement dans leurs écrits quelques incertitudes, quelques contradictions, quelques erreurs, et, pour peu qu’on en découvre, ce qui n’est pas bien difficile, on se croit autorisé à repousser en masse leurs prétentions Et nous aussi nous savons que les économistes ne sont pas toujours d’accord et qu’ils se trompent quelquefois, bien qu’on exagère presque toujours la portée de leurs contradictions, de leurs erreurs ; nous croyons surtout qu’ils ne signalent pas toutes les vérités utiles, et qu’il y a dans leurs théories bien des lacunes. Qu’importe, s’ils ne demandent après tout que le règne du droit, s’ils respectent le libre arbitre de l’homme et le mouvement régulier des transactions ? Leurs omissions ne tirent point à conséquence,