point étonnés que M. Mon et M. Pidal essayassent de se couvrir contre M. Isturitz en suscitant un candidat qui leur fait propre ; M. Isturitz, notoirement dévoué à l’intérêt anglais, ne saurait mieux le servir qu’en travaillant à l’avènement du prince Léopold de Cobourg.
Proclamée il y a quelque temps avec bien plus d’éclat qu’aujourd’hui, cette candidature est, assure-t-on, maintenant plus près de réussir qu’elle ne l’avait encore été. Elle n’est pas plus populaire qu’une autre, elle est moins impopulaire que l’influence française et la contrarierait ; voilà le vrai mérite qu’on lui trouve en Espagne. Il est dur, mais nécessaire de le confesser : les Espagnols qui aiment encore leur pays se sont pris d’une aversion toute nouvelle au sujet de la France. La France s’est montrée jusqu’ici l’alliée de la reine Christine et non point l’alliée de l’Espagne ; l’Espagne ne lui pardonne pas cette affection malheureuse et nous reprochera toujours de lui avoir renvoyé cette princesse, devenue l’objet de toutes les haines nationales. L’Espagne déteste la bienveillance superbe, la protection maladroite qu’on a si publiquement affichée pour sa triste fortune ; elle déteste encore davantage la complaisance avec laquelle on s’est mis à la suite des passions de la reine, au lieu de les conseiller et de les corriger. Il y avait un jeune prince qui faisait l’espoir de tout le monde et promettait assez, sinon pour exciter l’enthousiasme, du moins pour calmer bien des inquiétudes ; c’était don Enrique. Nul ne semblait plus naturellement appelé à recevoir la main d’Isabelle ; mais don Enrique est le fils d’une sœur à qui Christine doit une bonne moitié de sa couronne, et il y a de ces obligations dont on ne se débarrasse que par l’ingratitude : Christine n’a pas voulu du fils de sa sœur pour époux de sa fille. Sur quoi, sans plus la dissuader, nous avons cherché ailleurs, et nous avons trouvé le comte de Trapani : nous ne pouvions choquer plus profondément l’Espagne, qui n’a jamais caché l’antipathie que lui inspirent les Bourbons de Naples. Le prince sicilien était, pour comble de malheur, élève des jésuites et frère de Christine. Ç’a été un soulèvement unanime, et il a fallu reculer devant un vrai mouvement public appuyé sur une protestation extraordinaire des cortès. Aujourd’hui la reine s’attache à rejeter sur la France toute l’initiative de ce projet, qui était secrètement conforme à ses vœux les plus chers ; elle s’en défend même beaucoup plus vivement qu’elle ne s’est défendue d’avoir poursuivi ses neveux de sa rancune : nous portons encore à nous seuls tout le poids de cette nouvelle disgrace. Nous n’aurions pas été plus heureux, si le comte de Montemolin s’était vu définitivement inscrit parmi les prétendans ; on eût eu de la peine à penser que l’on négociât à Bourges sans notre concours, et, l’archevêque de Bordeaux étant venu récemment à Madrid, on a cru partout reconnaître dans son voyage un motif plus grave que la pieuse intention qu’il annonçait. Bordeaux est le foyer de l’émigration carliste en France, et les carlistes d’Espagne ont justement profité de l’arrivée du prélat français pour recommander la candidature du comte de Montemolin et rédiger un mémoire officiel dans le sens du manifeste publié l’année dernière par le prince de leur choix. La combinaison a manqué, parce que M. de Viluma a refusé de la seconder. Après ce mauvais succès, on ne s’est pas fait faute de dénoncer encore la main de la France. Au fond, la reine Christine n’eût pas été fâchée d’un arrangement qui apaisait les singuliers scrupules de cette conscience désormais si timorée ; mais la révolution n’a pas été assez vaincue en Espagne par ce prétendu parti modéré qui invoque le nom de notre gouvernement,