du plafond d’Homère peut mieux faire, et a fait mieux. Le Jésus-Christ remettant à saint Pierre les clés du Paradis, composé pour l’église du couvent de la Trinité-du-Mont à Rome, et qu’on voit aujourd’hui au Luxembourg, et le Vœu de Louis XIII, nous paraissent plus complets. Ces compositions de moins longue haleine conviennent mieux au talent de M. Ingres, dont la volonté et la patience ne se fatiguent jamais, mais dont quelquefois la force paraît s’épuiser. De là les inégalités du plafond d’Homère.
A propos de cette composition, nous ferons une dernière observation. M. Ingres, dans la représentation de la figure humaine, ne se laisse jamais aller à la fantaisie. On peut comparer les personnages de ses tableaux à ces statues-portraits, statues iconicœ, que les sculpteurs grecs élevaient aux vainqueurs des jeux olympiques. La physionomie de chacun de ses personnages paraît en effet calquée sur la nature. Chacun d’eux a vécu ou pourrait vivre. M. Ingres sait en outre choisir fort heureusement ses modèles, et le caractère de la physionomie est toujours parfaitement approprié à leur rôle, à leur importance. M. Ingres diffère essentiellement, sur ce point, de la majorité des peintres de l’école de David, dont tous les personnages semblent copiés sur un même type imaginaire, ou sur de vulgaires modèles d’atelier. Quand on examine la plupart des peintures de cette époque, il semble qu’il ait existé une sorte de patron banal, applicable à chaque âge de la vie, sur lequel enfans, vieillards, jeunes gens ou hommes faits, étaient uniformément taillés. Souvent presque tous les personnages d’un même tableau se ressemblent entre eux, quels que soient l’âge et le sexe. Voyez plutôt l’Hippocrate de Girodet, où le même profil se répète jusqu’à dix fois. On sent tout ce qu’un pareil procédé entraîne de monotonie et d’ennui. La banalité des types est à la peinture ce que la banalité des caractères est à la littérature, et, à de rares exceptions près, la peinture comme la littérature de l’empire pèchent par une excessive banalité. C’est en fréquentant assidûment la nature que M. Ingres a su échapper à l’insipidité qui a tué l’école impériale. La vérité et la variété des types et des expressions constituent son originalité. C’est là une des qualités les moins contestables de sa peinture, ou plutôt de son dessin ; elle corrige ce que les procédés d’exécution peuvent avoir d’un peu sec et d’un peu froid, elle leur communique ce souffle de la vie que la réalité seule peut donner. Nous insisterons d’autant plus sur cette qualité de l’auteur du plafond d’Homère, que les critiques de l’école impériale la lui ont reprochée comme un défaut. Il était de mode, il y a quelques années, de dire que M. Ingres ne pouvait faire que des portraits, et qu’il ne savait peindre que la peau.
Comme dessinateur, il se préoccupe beaucoup plus du dessus que du dessous ajoutaient ces critiques. Il oublie que Prométhée, avant d’animer l’homme, a commencé par modeler son squelette. La peau n’est