dans toute leur puissance ; quand il aura vu à Saint-Zacharie Jean Belin émule de son meilleur élève, il nous reviendra plus ardent et plus sûr de lui-même. En étudiant les œuvres de ces maîtres, qui conviennent si bien à la nature de son talent, il comprendra plus nettement vers quel but il doit marcher, et, si sa bonne étoile lui donne à peindre quelque nouveau chant de la Divine Comédie, il accomplira sa tâche avec une puissance dont il sera lui-même étonné.
M. Hippolyte Flandrin s’était déjà essayé dans la peinture monumentale à Saint-Severin, et nous avons retrouvé avec plaisir, dans la chapelle qu’il a décorée, le savoir et l’habileté dont il avait donné des preuves éclatantes dès ses premiers débuts ; mais nous regrettions de trouver dans la chapelle de Saint-Severin une absence à peu près complète d’originalité. Le saint Jean de la Cène peinte par M. Hippolyte Flandrin est en effet copié à peu près littéralement sur le saint Jean de la Cène de Giotto à San-Miniato. Et puis, s’il faut dire toute notre pensée, la chapelle de Saint-Severin n’est pas seulement dépourvue d’originalité, elle est aussi dépourvue de grandeur. Malgré le soin avec lequel il a orné sa mémoire et garni ses cartons, l’auteur a donné à la plupart de ses personnages un caractère qui n’a rien à démêler avec l’idéal. Dans ses peintures de Saint-Germain-des-Prés, M. Hippolyte Flandrin a trouvé le secret d’agrandir sa manière en donnant à l’exécution des morceaux plus de précision et de sévérité. Il s’est montré savant sans ostentation ; il n’a pas fait parade de son habileté. Sur les deux murailles livrées à son pinceau, il a écrit deux grandes compositions : l’entrée de Jésus-Christ à Jérusalem et Jésus-Christ portant sa croix. De ces deux compositions, la meilleure à notre avis est l’entrée de Jésus-Christ à Jérusalem. Le parti adopté par l’auteur pour le fond de ces deux peintures donne à la silhouette des personnages quelque chose de sculptural qui peut-être ne plaira pas d’abord, mais que je ne saurais blâmer. Ces peintures sont exécutées sur fond d’or comme les œuvres de l’école byzantine : il n’y a pas de ciel au-dessus des personnages ; mais la composition, pour être moins réelle, n’en est pas moins claire. Je crois donc que M. Flandrin a bien fait d’adopter ce parti. D’ailleurs, hâtons-nous de le dire, dans les peintures de Saint-Germain-des-Prés, il n’y a de byzantin que le fond d’or. L’auteur, éclairé par un goût sûr, a compris que l’archaïsme appliqué aux arts du dessin n’est pas moins puéril que dans les compositions littéraires. Ayant à traiter deux sujets qui ont souvent exercé le talent des peintres byzantins, il s’est abstenu sagement d’imiter le style de ces maîtres primitifs. Il n’a pas cru non plus pouvoir imiter le style des maîtres florentins du XIVe siècle. Il a pris ses modèles dans l’époque la plus florissante de l’école romaine. Il s’est efforcé courageusement de reproduire, autant qu’il était en lui, le style large et sévère des fresques du Vatican. En traitant deux sujets catholiques selon