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traiter dans le Journal des Savans avec toute l’autorité qui s’attache à son nom, célèbre à plus d’un titre, et M. Despretz a annoncé qu’il allait entreprendre des expériences pour reconnaître si les mêmes effets se produisent lorsqu’on cherche à agir sans intermédiaire sur les rayons lumineux. D’autres travaux se préparent sur le même sujet. Sans prétendre nullement nous ériger en juge, nous avouerons qu’il nous serait difficile de nous persuader que, dans l’expérience de M. Faraday, l’action des aimans plût s’exercer directement sur les rayons lumineux. Nous aimerions mieux considérer les phénomènes observés comme l’effet d’une espèce d’aimantation particulière produite par les courans électriques sur les corps que M. Faraday fait traverser au rayon polarisé. M. Becquerel, à qui l’on doit tant d’ingénieuses découvertes sur l’électricité et sur le magnétisme, a depuis long-temps reconnu que tous les corps peuvent donner lieu à certains phénomènes magnétiques ; il n’y aurait donc rien d’extraordinaire à concevoir dans l’expérience de M. Faraday que les molécules des corps sur lesquels on a opéré pussent ressentir une action analogue à celle qu’éprouvent certains corps répandus dans un liquide après qu’on les a réduits en parcelles très minces. On sait que, par l’action des courans électriques, il est possible de produire une espèce de frémissement dans certaines barres métalliques, et l’on n’ignore pas non plus que, d’après une curieuse observation de M. Biot, le seul frémissement qu’éprouvent les laines de verre, lorsqu’on y exécute des vibrations longitudinales, suffit pour faire naître, entre les particules de ces lames, des relations de position et de mouvement qui leur donnent la faculté, tant qu’elles demeurent dans cet état, de modifier la polarisation des rayons lumineux. Pourquoi les courans électriques qui excitent ce frémissement dans des barres métalliques ne produiraient-ils pas un effet analogue dans les corps diaphanes que M. Faraday a soumis à l’observation ? Peut-être pourrait-on éclairer cette question en soumettant à l’action d’aimans très énergiques les plaques de verre avec lesquelles on répète habituellement les expériences acoustiques de Chladni, et en examinant si les figures observées par cet habile physicien, dans la poussière répandue sur ces lames, ne changeraient pas de forme lorsqu’on ferait vibrer les plaques sous l’influence de ces aimans.

Pendant qu’en Angleterre M. Faraday ouvrait aux expérimentateurs un nouveau champ de recherches, un autre savant, M. Melloni, bien connu des physiciens pour ses belles et originales observations sur la chaleur rayonnante, s’appliquait, avec une grande sagacité, à faire réussir à Naples une expérience qui avait été mille fois tentée ailleurs sans succès. Il s’agit de la chaleur lunaire, que théoriquement on savait devoir exister, mais que personne jusqu’à présent n’était parvenu à rendre sensible à nos thermomètres. Enfin M. Melloni, qui possède des instrumens très délicats, a pu constater que non-seulement la lune nous envoie de la chaleur, mais que, de plus, cette chaleur, comme on pouvait le prévoir, varie avec les phases de notre satellite, c’est-à-dire qu’elle augmente ou diminue suivant que la face de la lune que nous voyons est plus ou moins éclairée par le soleil. Cette chaleur varie en outre avec la distance à laquelle est placé cet astre et avec sa hauteur sur l’horizon. Après avoir ainsi prouvé l’existence de la chaleur lumineuse de la lune, c’est-à-dire de la portion de la chaleur solaire réfléchie par cet astre, il serait intéressant de reconnaître la chaleur obscure, c’est-à-dire la chaleur que la lune nous envoie lorsque la face qui est tournée