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« Et multiplions-nous ces choses comme hommes, ou les faisons-nous pour l’amour du Seigneur Christ et de son peuple ? Véritablement, par la grace de Dieu, nous ne sommes pas effrayés de votre nombre ni confians en nous-mêmes. Nous pourrions, — je prie Dieu que vous ne preniez pas cela pour une vanterie, — nous pourrions faire face à votre armée, à tout ce que vous pouvez amener contre nous. Nous avons donné, — nous le disons humblement devant notre Dieu, en qui est tout notre espoir, — nous avons donné quelque preuve que des pensées de cette espèce n’ont pas d’empire sur nous. Le Seigneur n’a pas détourné sa face de nous depuis que nous vous avons approchés de si près.

« Le poids de vos propres péchés est déjà plus que vous ne pouvez supporter : n’attirez donc pas sur vous le sang d’hommes innocens, — trompés par les prétextes du roi et de l’alliance (covenant), — aux yeux de qui vous cachez une connaissance plus réelle ! Je suis persuadé que plusieurs d’entre vous qui conduisent le peuple ont eu de la peine à se persuader dans ces choses, dans lesquelles vous avez censuré les autres, et vous êtes établis « sur la parole de Dieu. » Tout ce que vous dites est-il donc infailliblement selon la parole de Dieu ? Je vous adjure, par les entrailles de Christ, de croire qu’il est possible que vous vous trompiez. On peut mettre précepte sur précepte, ligne sur ligne, et cependant la parole du Seigneur peut être pour quelques-uns la parole du jugement, afin qu’ils tombent à la renverse et soient brisés, et qu’ils tombent dans le piège et soient pris[1] ! Il peut y avoir une plénitude spirituelle, que le monde peut appeler ivresse[2]. Il peut y avoir aussi une confiance charnelle en des préceptes mal compris, ce qui peut être appelé une ivresse spirituelle. Il peut y avoir un covenant fait avec la mort et avec l’enfer[3] ! Je ne prétends pas dire que le vôtre soit ainsi. Mais jugez si ces choses ont un but politique : d’éviter le fléau qui déborde, ou d’accomplir des intérêts mondains ; et si en cela nous[4] avons fait alliance avec des hommes méchans et charnels, et si nous avons de l’estime pour eux, ou autrement si nous les avons attirés à faire pacte avec nous, si c’est là un covenant de Dieu, un covenant spirituel ? Pensez à ces choses ; nous espérons que nous y avons pensé.

« Je vous prie de lire le vingt-huitième chapitre d’Isaiah, depuis le cinquième jusqu’au quinzième verset ; et n’ayez pas honte de savoir que c’est l’esprit qui vivifie et qui donne la vie.

« Que le Seigneur vous donne l’entendement pour faire ce qui est agréable à ses yeux.

« Vous confiant à la grace de Dieu, je demeure

« Votre humble serviteur

« OLIVIER CROMWELL. »

  1. Paroles de la Bible.
  2. Comme dans le second chapitre des Actes.
  3. Comme vous pouvez dire de nous, tandis que c’est plutôt vous qui êtes « ivres. »
  4. C’est-à-dire vous.