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Essex, homme d’esprit et d’une raison calme, se laissa bientôt dépasser par le moteur ardent de cette guerre sainte, par le calviniste populaire et le fermier résolu. Cromwell, d’abord second commandant des puritains, monta au premier rang, qu’il garda ; ceux qui le soutenaient étaient surtout les francs-tenanciers ou leurs fils, soldats par sentiment du devoir, enthousiastes de religion et de politique. A leur tête, il se trouva maître du mouvement révolutionnaire et guerrier.

Dès 1643, les journaux signalent comme le plus heureux et le plus biblique des soldats parlementaires - that valiant soldier, M. Cromwell. Ses bulletins font autorité ; le premier de ces bulletins est daté de Grantham[1] :

A… cette lettre.


« Grantham, 13 mai 1643.

« MONSIEUR,

« Dieu nous a accordé ce soir une glorieuse victoire sur nos ennemis. Ils avaient, d’après ce que nous apprenons, vingt et un étendards de cavalerie légère, et deux ou trois de dragons.

« C’est vers le soir qu’ils sont sortis et se sont formés devant nous, à deux milles de la ville. Aussitôt que nous entendîmes le cri d’alarme, nous déployâmes nos forces, qui consistaient en douze escadrons, et les mîmes en bataille. — Quelques-uns de nos soldats étaient dans un état de faiblesse et de fatigue aussi grand que vous ayez jamais vu : il a plu à Dieu de faire pencher la balance en faveur de cette poignée d’hommes, car après que les deux partis furent restés pendant quelque temps en face l’un de l’autre hors de portée du mousquet, et quand les dragons des deux côtés eurent échangé des coups de fusil pendant une demi-heure ou plus, l’ennemi n’avançant pas sur nous, nous résolûmes de le charger, et approchant de lui après une fusillade de part et d’autre, nous avançâmes avec nos escadrons au grand trot. L’ennemi nous attendait de pied ferme ; nos hommes le chargèrent résolument ; par la Providence divine, nous le mîmes aussitôt en déroute. Tout prit la fuite, fut poursuivi et sabré pendant deux ou trois milles.

« Je crois que dans la poursuite plusieurs de nos soldats ont tué chacun deux ou trois hommes ; mais nous ne sommes pas certains du nombre des morts. Nous avons fait quarante-cinq prisonniers, outre les chevaux et les armes tombés en notre possession ; nous avons délivré plusieurs prisonniers qu’ils nous avaient faits depuis peu, et nous leur avons pris quatre ou cinq étendards.

« Je suis

« OLIVIER CROMWELL.”

  1. Perfect Diurnals, etc., 22-29 may 1643. (Journal parfait, etc.)