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en fin de cause la garantie suprême de cette légitimité nouvelle ? C’était la parole de l’apôtre, que toute puissance vient de Dieu, mais alors naturellement interprétée, par une complaisance exclusive, à l’unique profit des monarchies et des dynasties. On opposait cette légitimité de droit divin à cette autre légitimité que l’assentiment populaire avait décernée pendant quinze ans à un soldat victorieux. Il y avait beaucoup de cette idée-là dans le nom même de la sainte-alliance : c’était l’union de toutes les souverainetés chrétiennes contre la souveraineté du peuple, représentée par son plus glorieux délégué. Animés d’un pareil esprit, les gouvernemens allemands devaient chercher à le répandre, et le saint-siège ne pouvait se refuser à les aider. La réorganisation de l’église catholique sous la loi du principe d’autorité n’était pas seulement chose satisfaisante pour son premier pontife ; c’était chose rassurante au point de vue politique pour les souverains temporels, si vivement intéressés désormais à la déchéance du principe d’examen. Seulement, tout en souhaitant un établissement ecclésiastique qui, pour consolider le trône, l’appuyât sur l’autel, ils prétendaient bien ne pas agrandir l’un aux dépens de l’autre ; ils n’étaient point d’humeur à rien relâcher de leurs conquêtes sacrilèges, ils ne voulaient que les faire bénir pour les garder plus sûrement. On finit par tomber d’accord, grace à des compromis tacites. La chancellerie romaine envoya solennellement ses bulles, partagea les territoires en diocèses, institua les évêchés, établit les chapitres, fixa le chiffre des dotations ecclésiastiques, bref, décida du temporel au même titre que du spirituel. Les princes reçurent les bulles, mais avec tant de clauses accessoires, tant de modifications et de réserves, qu’ils ne crurent pas avoir entamé la suprématie de l’état. Ils nommèrent les évêques aux lieux qu’on leur désignait ; mais ils les choisirent si soumis et si dévoués, qu’ils ne s’aperçurent pas d’abord du changement. Rome laissa faire dans la pratique ; le tout était pour elle de prendre possession. Elle avait cause gagnée quant au principe. Après quelques années d’attente, elle jouit pleinement aujourd’hui de sa victoire, et se déclare partout maîtresse. En Bavière même, elle en est venue là du premier coup : le concordat de 1817, ajouté comme annexe organique à la constitution de 1818, l’annulait au lieu de la compléter. Avec la Prusse, il est vrai, avec le Hanovre et la Saxe, avec Bade et Wurtemberg, il fallut user de patience : pour ne parler que des deux derniers, ce fut seulement en 1827 que la province catholique du Haut-Rhin se trouva définitivement constituée. Elle comprit le Wurtemberg, Bade, Hesse-Casse], Hesse-Darmstadt, Nassau, Francfort et la principauté