Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tenu par le président de l’Union américaine ne fît supposer que la question du droit de visite avait été résolue par les plénipotentiaires anglais et américains, et que l’Angleterre avait fait des concessions sur ce point. Dans cette appréhension, lord Aberdeen écrivit à M. Fox, ministre d’Angleterre aux États-Unis, une dépêche en date du 18 janvier 1843, qui devait être communiquée au secrétaire d’état de l’Union, et où il maintient les principes développés dans la dépêche du 20 décembre 1841, à savoir que l’Angleterre avait droit de faire visiter par ses croiseurs les navires sous pavillon américain, quand il y aurait apparence que ce pavillon serait arboré frauduleusement, et que des instructions avaient été données en conséquence aux croiseurs anglais. Lord Aberdeen ajoutait d’ailleurs qu’en cas de visite faite sans motifs suffisans, et en cas de préjudice souffert par les navires américains par suite de ces visites, réparation serait faite.

M. Webster, secrétaire d’état de l’Union américaine, ayant reçu communication de cette pièce, y répondit, le 28 mars 1843, par une dépêche adressée à M. Everett, et destinée à être communiquée à lord Aberdeen. Développant à son tour les principes énoncés en 1841 par M. Stevenson, M. Webster déclare que la visite pour vérification de nationalité n’offre pas moins d’inconvéniens que celle qui a pour but de vérifier la nature des opérations, et que les réparations offertes en certains cas par lord Aberdeen seraient toujours insuffisantes et tardives ; il maintient qu’à moins de soupçons graves de piraterie, aucun navire américain ne doit être ni interrompu dans sa navigation, ni abordé, ni visité, même pour vérification de la nationalité ; que tout navire marchand américain a droit de s’y refuser ; que, si l’on veut l’y contraindre, ce navire sera dans le cas de légitime défense, et qu’ainsi la responsabilité de toutes les conséquences que cette résistance peut entraîner pèsera sur le croiseur.

Les États-Unis, par suite du traité de Washington, entretiennent une croisière sur les côtes d’Afrique. Les instructions données par M. Upshur, ministre de la marine américaine, en date du 15 mars 1843, aux croiseurs américains, leur prescrivent de ne pas vérifier la nationalité des navires sous pavillon étranger.

On peut donc affirmer, d’après tout ce qui précède, que la doctrine de tous les états maritimes, et particulièrement de la France, de l’Amérique et même de l’Angleterre avant 1841, a été positivement contraire au droit que la convention de 1845 vient d’instituer, à ce droit qui nous est présenté comme un principe absolu et universellement accepté.