condisciples des autres nations slaves leur avait fait chercher une idée commune, et ils n’en avaient pas trouvé d’autre que l’idée slave. Ce fut donc dans l’intérêt général de la race, de sa plus grande gloire, de sa plus grande liberté, que le panslavisme s’organisa de Berlin à Vienne, et de Vienne jusqu’à Pétersbourg. Son mot d’ordre était le plus simple du monde : « soutenir tout ce qui est slave, suivre toute impulsion ayant pour but l’affranchissement des peuples slaves, se refuser à tout autre appel. » Pour mieux échapper aux inquisitions les plus minutieuses de la police, il fut sévèrement interdit aux conjurés de chercher à connaître leurs frères ; chaque nouvel initié eut pour devoir d’en initier quatre autres, mais pas un de plus. Aucun groupe ne dut se composer de plus de cinq personnes. Ennemie, comme le génie slave, de toute centralisation, l’association conservait par là toute son élasticité. En outre, dans ce système, tout ce que peut faire la police, même aidée par les tortures, c’est d’obtenir qu’un conjuré dénonce ses quatre complices ; les autres, il ne les connaît pas même de nom. Quant aux chefs supérieurs, il n’y en a pas : c’est la race, c’est le génie slave qui précipite ou qui ralentit le mouvement. En se fondant sur de pareilles bases, la conspiration devenait facile ; le peuple entier en était complice. Le plan des nobles et de la jeunesse, admirablement conçu, ne pouvait manquer de réussir, si l’Autriche avait résisté franchement, au lieu d’employer contre ses adversaires la diffamation et la calomnie. Les nobles étaient prêts à se dépouiller de tous leurs privilèges, de tous leurs titres, de tout leur passé, et à en appeler au peuple pour constituer avec lui un ordre de choses entièrement nouveau, ayant pour base la plus large démocratie qui soit compatible avec l’ordre public et l’indépendance nationale. Forte et fière de son programme, la noblesse s’élança avec l’impétuosité slave dans sa nouvelle carrière, sans songer à sonder le terrain pour s’assurer s’il n’y avait pas une contre-mine.
A l’époque marquée pour l’explosion générale, du 19 au 20 février, les conjurés se levèrent partout avec le même drapeau. A Posen, en Gallicie, à Cracovie, et même dans la Pologne russe, les plus grands propriétaires, les plus notables représentans de l’aristocratie, proclamèrent hautement l’émancipation complète et définitive des paysans ; mais, à leur grand étonnement, ils se trouvèrent sur ce terrain en concurrence avec l’Autriche, que nous avons montrée travaillant depuis long-temps le bas-peuple, à l’aide de ses espions, avec un programme analogue. Ceci explique pourquoi le manifeste