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UN


VOYAGE EN ORIENT


PAR M. D’ESTOURMEL[1]




Un jour d’été de 1833, je naviguais, par une fraîche brise du matin, dans l’orageux et étroit canal qui sépare l’île d’Hydra de la côte ferme du Péloponèse. J’avais à gauche les vertes montagnes qu’on appelle les Jardins, parce que leurs flancs et leurs pieds sont ombragés de quelques lauriers-roses et de quelques grenadiers ; à droite, l’île, ou plutôt le rocher d’Hydra, dont les maisons, pour ainsi dire ciselées dans le rocher, font ressembler la ville à une large écaille de tortue qui dort sur la mer. Nous filions huit nœuds à l’heure, toutes voiles dehors jusqu’aux bonnettes ; notre navire, quoique solide et vaste, craquait sous le poids des mâts et sous les coups des grosses lames qui le prenaient en poupe, et qui rejaillissaient en jets d’écume salée sur le pont. En peu d’heures, nous atteignîmes l’entrée du profond golfe d’Athènes. Là, les trois mers se rencontrent dans une embouchure de dix ou douze lieues de largeur. Le choc des lames contraires qui venaient s’y engouffrer produisait un remous terrible ; la surface

  1. Deux beaux volumes in-8o avec dessins.