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modernes. Sous le rapport de l’ordre scientifique, de la surveillance et des soins, les plus exigeans trouveraient difficilement quelque chose à reprendre ; mais il est une mesure que depuis long-temps des hommes spéciaux réclament de tous leurs vœux : nous voulons parler de l’adjonction au dépôt de la Bibliothèque du musée monétaire formé par M. de Sussy à l’hôtel des Monnaies. Dans chacun des deux musées, on trouve des séries incomplètes ; cette adjonction comblerait les lacunes, et elle épargnerait dans les achats plus d’une dépense inutile. Il y aurait aussi profit pour le public, car le musée de la Monnaie est à peu près inaccessible, et, sous le rapport de la direction scientifique, on y trouverait, comme on eût dit au XVUe siècle, bien des choses à rappoincter.

Pour les visiteurs qui n’ont d’autre mobile que la curiosité, et qui se contentent d’admirer les belles choses, les antiques l’emportent sur les médailles ; le cabinet contient même plus que sa désignation ne semblerait promettre. Comme l’antiquité, le moyen-âge et la renaissance y sont représentés par des chefs-d’œuvre également précieux, également bien choisis ; car ce n’est pas seulement le vernis de l’âge, mais le cachet de l’art qu’on exige des objets admis, et il serait à désirer qu’on rencontrât cette discrétion, cette consigne sévère, à la porte de tous les musées. Une somme de 30,000 francs est affectée chaque année aux acquisitions, nais cette somme paraît insuffisante à quelques amateurs passionnés qui prétendent que les Anglais, nos rivaux en toutes choses, nous enlèvent, en vertu du droit d’enchère, nos raretés les plus précieuses, et, pour soutenir la lutte, on demande, comme toujours, une augmentation sur les crédits. On dit encore que, si les dons sont de jour en jour plus rares, c’est qu’on ne fait peut-être point, pour encourager les donateurs, ce qu’il conviendrait de faire, et qu’on est à leur égard indifférent, quelquefois même ingrat. Enfin on demande pour les médailles antiques qu’il soit publié un supplément au catalogue de Mionnet, et un inventaire des objets d’art grecs, romains, du moyen-âge ou de la renaissance, attendu que la description donnée par M. Dumersan laisse à désirer sous plus d’un rapport. On ajoute qu’il est fort difficile d’obtenir communication des acquisitions nouvelles, et que le public, pour en prendre connaissance, est généralement obligé d’attendre que les érudits de l’Institut aient fait leur mémoire. Quelques personnes verraient donc avec plaisir qu’on publiât chaque année un état de situation. A part l’augmentation des crédits, ces observations paraissent fort plausibles aux gens bien informés.

Nous ne nous arrêterons point à décrire le département des manuscrits : un volume suffirait à peine pour raconter avec quelque détail la formation de cette collection inestimable à laquelle chaque peuple et chaque siècle ont fourni leur contingent, et qui compte aujourd’hui quatre-vingt mille volumes environ, et plus d’un million deux cent mille pièces détachées. A côté des documens scientifiques et littéraires, à côté des manuscrits de l’Inde et du Japon, on trouve d’immenses encyclopédies historiques qui effraient et découragent par leur abondance même, et qui nous montrent combien est ridicule