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nobles sentimens[1], M. le général Kalergi affirme que ce n’est ni au sein du conseil d’état, ni par un Grec, qu’ont été proposées en septembre 1843 la déchéance du roi Othon et les deux fameuses ordonnances qui ajoutaient l’humiliation à la défaite. Comme il s’agit d’un fait dont M. Kalergi a été témoin lui-même, j’enregistre très volontiers sa déclaration. M. le général Kalergi réclame aussi avec toute raison contre le reproche d’avoir voulu, le jour où le ministre Maurocordato est tombé, entrer dans la salle des élections à la tête des gendarmes. Il est certain que ce n’est point à M. le général Kalergi que

  1. Voici la lettre que nous recevons de M. le général Kalergi :

    Athènes, le 8/20 novembre 1844.

    À MONSIEUR LE DIRECTEUR DE LA REVUE DES DEUX MONDES.

    « Dans l’intérêt de la vérité, je vous prie de vouloir bien insérer les observations suivantes, en réponse à quelques assertions de M. Duvergier de Hauranne dans l’écrit que votre estimable recueil a publié en date du 15 octobre.

    « Agréez, monsieur, l’assurance de ma considération distinguée.

    « Le général aide-de-camp de sa majesté le roi de Grèce,
    Demitris Kalergi


    « Lorsque l’autorité d’un nom aussi distingué que celui de M. Duvergier de Hauranne couvre une erreur, cette erreur prend crédit, s’étend, se perpétue, et l’exactitude de certains faits historiques demeure ainsi altérée.

    « Dans un exposé sur la situation de la Grèce et son avenir, l’honorable député, par suite d’informations infidèles, avance des faits que l’honneur de mon pays et le mien propre ne me permettent pas de laisser passer sous silence.

    « Le but de la réforme du 3/15 septembre 1843 tendait uniquement à substituer à un arbitraire de dix ans les garanties du régime constitutionnel. En cela, nous étions tous d’accord, et jamais la plus légère divergence de vues ne vint nous diviser, ni au dehors, ni au sein du conseil (1). Il n’est pas à ma connaissance qu’aucun des acteurs de ce grand drame ait jamais eu en pensée l’expulsion ou l’abdication du roi, et certes nul ne se fût hasardé à me proposer de m’associer à un pareil acte. Je n’avais en vue que l’établissement d’un gouvernement représentatif ; mais je le voulais avec le roi Othon, à qui je n’ai pas cessé d’être entièrement dévoué, et sans lequel je n’envisageais ni chances de succès dans l’entreprise, ni bonheur pour l’avenir. La noblesse des sentimens et la loyauté de sa majesté m’étaient connues, et les évènemens justifient pleinement aujourd’hui mes prévisions à cet égard. — Je ne saurais conséquemment accepter le mérite d’une opposition qui n’a pas été dans le cas de se montrer.

    « Des provocations à une abdication forcée m’ont été faites, il est vrai, au milieu de l’orage populaire, devant les portes du palais même, dans la nuit du 1/14 au 3/15 septembre ; mais elles ne vinrent point d’un Grec, je le dis à la gloire de mes compatriotes. Quant aux deux ordonnances du 3/15 septembre, sur la médaille et