dirent que médiocrement à de si formelles avances ; ce sont eux aujourd’hui qui voudraient reprendre les négociations. Séparé à l’amiable du Portugal, si l’on nous permet de parler ainsi, le Brésil a conservé toutes ses sympathies pour son ancienne métropole ; le Brésil prendrait encore ses vins, ses produits agricoles, ses instrumens aratoires, ses toiles de fil, ses fers de Braga ; le Brésil est si favorablement disposé en faveur du Portugal, qu’il préfère ses fers à ceux de l’Allemagne, bien que l’Allemagne pût lui fournir les siens à un prix beaucoup moins élevé, moins chers des deux tiers ou peu s’en faut. Que l’industrie prospère à Lisbonne, à Porto, à Braga et dans toutes les villes du royaume, elle n’aura jamais à craindre de ne pouvoir placer tous ses produits ; sans parler des échanges que le Portugal pourrait faire avec certains pays d’Europe et d’Amérique, ses vastes colonies qu’il néglige, en absorbant une grande quantité de ces produits, formeraient des entrepôts admirables pour un grand commerce à travers l’Asie et l’Afrique, jusque dans les lointains continens et les archipels reculés où survivent les glorieux souvenirs des ancêtres. Le vieil Orient lui-même, celui qui touche à nos portes, lui offre ses marchés, d’où le négoce européen a été si long-temps banni. Ce n’est point, à vrai dire, d’une mission politique, mais bien plutôt d’une négociation commerciale que tout récemment l’ambassadeur turc, Fuad-Effendi, a été chargé auprès de la reine doña Maria. Fuad-Effendi devait remplir la même mission auprès de la reine Isabelle : peut-être, avant d’aborder dans la Péninsule, l’envoyé turc ne soupçonnait-il pas lui-même l’isolement complet où, vis-à-vis l’une de l’autre, vivent encore les deux nations.
Pour l’Espagne, à l’avénement de Philippe V, un siècle après que le Portugal eut secoué sa domination, le Portugal n’avait point cessé d’être un vassal révolté ; pour Charles II lui-même et pour le conseil de Castille, les princes qui régnaient à Lisbonne étaient les fils des ducs de Bragance, dépouillés, à titre de félons, de leurs domaines héréditaires, et non certes les légitimes héritiers du roi dom Sébastien. Aussi, lors des guerres de la succession, le Portugal se prononça-t-il contre le duc d’Anjou, le prétendant populaire, qui véritablement avait le cœur de la nation espagnole ; le Portugal se jeta dans les bras de ceux qui s’intéressaient le plus vivement au triomphe de l’archiduc autrichien ; il se jeta dans les bras des Anglais. La paix se conclut enfin, une paix qui assurait la couronne d’Espagne au petit-fils de Louis XIV, mais qui en même temps témoignait de la profonde lassitude et de l’affaiblissement moral du roi de France. Le fameux traité des Pyrénées est le dernier grand acte du roi Louis XIV, mais de Louis XIV épuisé de vieillesse et de chagrin. Ce traité, qui abandonnait à l’Anglais Mahon et Gibraltar, — Mahon, que nous avons rendu à l’Espagne, Gibraltar, où la Grande-Bretagne est plus solidement que jamais établie, — reconnaissait l’indépendance du Portugal et les droits de sa dynastie. En échange d’une telle concession, l’Espagne ne sut point exiger des avantages commerciaux qui, à toute autre nation que ce vieux peuple de Philippe ii en pleine déca-