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résultat de dépouiller le Portugal de sa richesse en numéraire, et par suite de sa richesse agricole et industrielle. A la vérité, l’Angleterre avait d’abord admis les vins du Portugal à des conditions assez avantageuses ; mais à peine le traité fut-il conclu, qu’elle accorda les mêmes conditions à la France et à d’autres nations européennes ; le Portugal se vit presque réduit à ne pouvoir plus faire que le commerce restreint des vins de Porto. Les conventions de Méthuen ont enfin expiré en 1834, et depuis lors c’est le but, opiniâtrement poursuivi, de l’Angleterre de les renouveler sur les mêmes bases ; malheureusement pour elle, son vassal industriel en a si bien senti les conséquences désastreuses, qu’il n’est pas en Portugal, quelles que soient d’ailleurs les querelles de la politique intérieure, un seul homme sérieux qui en veuille entendre parler. Pour s’en convaincre, il suffit de parcourir les nombreuses brochures qui maintenant se publient à Lisbonne, celle surtout qui a pour titre : Hontem, Hoje et Amanha (Hier, Aujourd’hui et Demain), où la question se trouve très clairement exposée. Les régimes septembristes qui ont précédé l’avènement de M. da Costa-Cabral, c’est l’Angleterre qui en a préparé et précipité la chute, ces régimes ne songeant à rien moins qu’à fonder un système de douanes et de tarifs dont elle pouvait prendre ombrage. M. de Sabrosa, un des chefs de la fraction la plus avancée du parti septembriste, M. de Bomfim, un des chefs de la fraction modérée, qui tour à tour ont gouverné leur pays, sont même allés jusqu’à solliciter l’intervention de la France ; il va sans dire que s’ils ont pu l’un et l’autre obtenir une réponse, cette réponse a dû être exactement semblable à celle que Naples a reçue de nous à l’occasion du droit de visite. Si, en renversant les septembristes, l’Angleterre s’était imaginé avoir plus facilement raison des partisans de la charte, l’Angleterre s’est préparé un rude mécompte. Pas plus que ses prédécesseurs, M. da Costa-Cabral ne paraît disposé à lui sacrifier l’avenir de son pays. Sur cette question, du moins, nous pouvons rendre pleinement justice à M. da Costa-Cabral. Vis-à-vis de l’Angleterre, le chef du gouvernement portugais a fait preuve d’une fermeté qui n’a fléchi ni devant les promesses ni devant les menaces. M. da Costa-Cabral a parfaitement compris deux choses : la première, c’est que, par le commerce et l’industrie seulement, se peut relever en Portugal la fortune publique, et que, pour cette raison, il est radicalement impossible de traiter encore avec la Grande-Bretagne sur les bases des anciennes conventions ; la seconde, c’est que les cortès, en définitive, si commode que soit leur docilité actuelle, ne lui permettraient jamais de résoudre sans leur assentiment, un assentiment que l’on veut mûrir, le problème où se trouve engagée la fortune même de la nation. L’Angleterre a eu beau s’y prendre de toute manière, flatteries, obsessions, caresses de diplomatie, rumeurs de guerre, hautains ultimatum, rien ne lui a réussi. Vainement, depuis le fameux traité de la quadruple alliance, on a remanié les conventions politiques ; éludant l’occasion, le Portugal a constamment ajourné les conventions commerciales. C’est tout au plus si lord Howard de Walden, le ministre plénipotentiaire de sa majesté britannique à Lisbonne, a pu obtenir une sorte