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lent aux congrégations que pour y voter en faveur de leurs maîtres, quant à ceux qui sont sans maîtres, ils vendent, comme en Angleterre, leurs votes pour de l’argent, pour un bon dîner, souvent pour un verre d’eau-de-vie. Les riches candidats s’attachent de cette manière des bandes d’électeurs ; souvent ils campent à part sous des tentes, comme des troupes en temps de guerre. Le matin du jour décisif, ces milliers de partisans, entourant leurs chefs respectifs, s’avancent, bannière et musique en tête, vers la maison du comitat, et chaque bande cherche à occuper le plus vite possible les principales avenues, afin de couvrir par ses cris la voix de tous les orateurs qui voudraient du haut des tribunes parler à l’assemblée contre son candidat. Faut-il s’étonner que de pareilles réunions électorales dégénèrent souvent en mêlées sanglantes, et que les coups de sabre y aient plus d’ascendant que les bonnes raisons ?

Malgré les crians abus de cette liberté sauvage, il y a dans le système hongrois des vices encore plus déplorables. Ces vices dérivent tous de l’état d’asservissement où sont tenus le bas peuple et la classe agricole. Heureusement la noblesse elle-même sent ce mal, et à chaque diète nouvelle, des réformes de plus en plus décisives s’accomplissent dans la législation, en faveur des paysans. La diète de 1832, qui a été une sorte d’assemblée constituante pour la Hongrie régénérée, a commencé héroïquement la lutte contre l’intérêt aristocratique et les préjugés indigènes ; elle a posé des principes d’où doit sortir un jour l’émancipation complète de toutes les classes de la nation. Le paysan a déjà acquis en Hongrie des droits considérables, un code nouveau le protège contre son seigneur ; il peut racheter, par une somme assez modique, les corvées et redevances dont sa terre est grevée. La bourgeoisie des villes est chaque jour mieux garantie dans ses stipulations commerciales. Les nobles peuvent maintenant être arrêtés pour dettes. Enfin, la liberté de la presse, bien qu’elle ne soit pas légalement reconnue, existe à peu près dans le royaume, puisque la censure y est surveillée par la diète. Il ne faut donc pas juger la Hongrie par ce qu’elle est aujourd’hui, mais par ce qu’elle sera dans vingt ans. La noblesse y est animée du plus large esprit de libéralisme ; elle est, on peut l’affirmer, démocrate de désir, et nous ne saurions dire s’il y a en Europe un pays où le progrès social marche relativement avec plus de rapidité.

Mais, dira-t-on, qu’est-ce qu’un pays où tous les gentilshommes sont électeurs et éligibles, et où le plus vil scélérat, s’il est possesseur d’une terre noble, fût-elle de dix pieds carrés, peut devenir député