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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

orthodoxe d’Orient étant la religion dominante des Grecs, tout prosélytisme exercé à son détriment est interdit aux autres communions chrétiennes. Ce n’est pas à dire que ces communions soient exclues du royaume ; elles y peuvent pratiquer même publiquement leur culte en pleine sécurité, mais elles y demeurent étrangères. La loi de succession au trône déclare que le prince royal devra être orthodoxe, sinon il perdra son droit de succession. S’il n’a pas été stipulé que l’épouse du monarque doit pratiquer, comme le monarque lui-même, la religion nationale, c’est par la seule considération que, dans l’état actuel des choses, si ce principe était adopté, les rois de Grèce ne pourraient s’allier à aucune autre maison régnante qu’à celle de Russie. De ce premier article il suit assez, quoique la charte ne le dise pas, que l’exercice des droits politiques en Grèce présuppose la profession de foi orthodoxe. La charte que se donna le peuple serbe en 1835 renferme des dispositions complètement analogues à celles qu’on vient de lire. Les Serbes, dans leur charte légèrement modifiée par la Porte en 1839, vont même, sous le rapport de la religion, plus loin que les Grecs, puisque le prince de Serbie, sous peine de déchéance, doit non-seulement rester fidèle au rite gréco-slave ou orthodoxe, mais encore ne se lier par mariage qu’avec des personnes professant ce rite. Enfin la Hongrie reconnaît également dans ses lois une église privilégiée, l’église catholique latine.

Outre l’unité religieuse, les constitutions gréco-slaves consacrent encore l’unité politique de la race, en établissant la plus complète égalité civile. Ce second principe sert, comme le premier, de base à la charte hellénique, qui déclare électeur tout Hellène âgé de vingt-cinq ans, de quelque rang et profession qu’il soit, pourvu qu’il ne serve pas comme domestique. Le cens n’étant pas en Grèce, comme chez nous, la mesure des capacités civiques, le droit électoral y découle de la commune et non de l’état. En outre, les colléges électoraux n’ont point le caractère profane qu’impriment à ces réunions les mœurs occidentales ; les élections grecques sont presque un acte religieux ; elles s’accomplissent dans l’église ou en face de l’église, à la suite de prières solennelles. Il est interdit au roi de distribuer des titres qui établiraient entre les citoyens des distinctions de rang, et d’accorder des priviléges qui pourraient rappeler l’aristocratie européenne. On a reproché avec raison à l’assemblée constituante d’Athènes un autochthonisme étroit, lorsqu’elle a décrété que les indigènes de l’Hellade seraient seuls admissibles aux charges civiles et militaires de l’état. Il faut cependant reconnaître que cette clause est,