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de mentir et de semer la discorde, ce qui est un sujet de confusion pour celui qui le fait.

« Ne sois pas un batteur de pavés, ne rôde pas dans les rues, ne perds pas ton temps dans les marchés ou dans les bains, de crainte que le démon ne te tente et ne fasse de toi sa victime.

« Ne sois pas affecté ou trop recherché dans ta mise, car c’est un indice de peu de jugement.

« Dans quelque endroit que tu te trouves, que ton regard soit modeste ; ne fais pas de grimaces, évite les gestes déshonnêtes ; tu passerais pour un libertin, et ce sont des piéges du démon. Ne prends personne par la main ou par ses habits, ce qui est le signe d’un esprit indiscret. Fais bien attention, quand tu marches, de ne pas barrer le passage à qui que ce soit.

« Si l’on te prie de te charger d’une affaire, et que ce soit pour te tenter, excuse-toi honnêtement de le faire, bien que tu puisses en retirer quelque avantage, et tu seras tenu pour un homme sage et prudent.

« N’entre pas ou ne sors pas avant tes supérieurs ; évite de prendre le pas sur eux, laisse-leur toujours la place d’honneur, et ne cherche à l’emporter sur personne, à moins que tu ne sois élevé en dignité, car tu serais regardé comme un grossier. Sois modeste ; l’humilité nous mérite la grace de Dieu et des puissans.

« Ne te hâte pas trop en mangeant ou en buvant, et, si tu es à table, offre à celui qui se présentera à toi dans le besoin de prendre part à ton repas ; tu en seras récompensé. Si tu manges en compagnie, que ce soit sans avidité et sans gloutonnerie, tu passerais pour un gourmand. Prends tes repas la tête baissée, et de manière à ne pas finir avant les autres, de peur de les offenser.

« Si l’on te fait un présent, quelque faible qu’il soit, ne le dédaigne pas, et ne pense pas mériter davantage, car tu n’y gagnerais pas devant Dieu ni devant les hommes.

« Confie-toi entièrement au Seigneur, c’est de lui que te viendra le bien, et tu ne sais pas quand tu peux mourir.

« Je me charge de te procurer ce qui te convient, souffre et attends patiemment. Si tu veux te marier, dis-le-moi ; et puisque tu es notre enfant, n’entreprends pas de le faire avant de nous en avoir parlé.

« Ne sois ni joueur ni voleur, car un de ces défauts occasionne l’autre, et c’est très honteux. Si tu évites de l’être, tu ne seras pas diffamé dans les places publiques et dans les marchés.

« Suis toujours le bon parti, ô mon fils. Sème, et tu récolteras ; tu vivras de ton travail, et conséquemment tu seras satisfait et chéri de tes parens.

« On ne vit dans ce monde qu’avec bien de la peine, on ne se procure pas facilement le nécessaire. J’ai eu bien du mal à t’élever, et pourtant jamais je ne t’ai abandonné et je n’ai rien fait dont tu puisses rougir.

« Si tu veux vivre tranquille, évite de médire, car la médisance occasionne des querelles.

« Tiens secret ce que tu entends dire ; qu’on l’apprenne plutôt par d’autres