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Déployons un aplomb au-dessus de mon âge ;


il a vingt-cinq ans, si je ne me trompe, et, à moins d’être bien peu avancé, on l’a été de tout temps à cet âge beaucoup plus qu’il ne le paraît. Féline a grand’raison de le traiter comme un écolier, en des vers qui sont d’ailleurs des mieux tournés, et mieux même qu’à lui n’appartient :

Voilà de mes roués en sortant du collége !
Les jeunes gens du jour ont ce travers commun
D’affubler leur candeur d’un vêtement d’emprunt,
De faire les lurons à qui rien n’en impose,
Et dont l’œil voit d’abord le fond de toute chose ;
De ne pas sembler neufs sottement occupés,
Ils mettent de l’orgueil à se croire trompés,
Perdant ainsi, pour feindre un peu d’expérience,
La douceur d’être jeune et d’avoir confiance !


C’est là du bon style ; mais il est fâcheux encore que toutes les saines pensées et les maximes justes de la pièce se trouvent rejetées dans la bouche de ce triste Féline, et qu’elles s’y trouvent (notez-le), non pas comme des ressorts de son rôle, mais à titre même de choses justes ; il devient ainsi par momens une manière d’Ariste véritable ; c’est Tartufe et Cléante mis en un, s’il est permis d’amener ici ces grands noms. — N’oublions pourtant pas d’ajouter que l’oncle Bridaine, si bien joué par Provost, et qui rentre dans les anciennes données comiques, est excellent : il prête aux meilleures scènes de l’ouvrage, et le second acte lui a dei son espèce de succès. La petite Juliette aussi a son accent à elle, vraiment ingénu.

A défaut d’une comédie de caractère, il aurait pu y avoir un agencement de pièce mieux entendu, une intrigue mieux ourdie ; le second acte semblait promettre à cet égard, le troisième n’a pas tenu : tout ce monde convoqué dans l’appartement d’Octave n’y produit rien de bien vif, de bien inquiétant ni de bien amusant. Rose s’en va mal raccommodée avec son vilain mari, et Juliette reste assez mal mariée avec son douteux amant. Le jeune et spirituel auteur a (c’est tout simple) beaucoup à apprendre de la pratique du métier et du jeu de la scène ; MM. Scribe et Alexandre Dumas, en ce genre d’habileté, sont des maîtres qu’il lui sera très profitable d’étudier. Mais ce que nous voudrions surtout suggérer à un talent aussi net et aussi naturel d’expression, aussi tourné par vocation, ce semble, aux choses de théâtre, ce serait d’agrandir, avant tout, le champ de son observation, non pas de vieillir (cela se fait tout seul et sans qu’on se le dise), mais de vivre, de se répandre hors du cercle de ses jeunes contemporains, de voir le monde étendu, confus, de tout rang, le monde actuel tel qu’il est, de le voir, non pas à titre de jeune auteur déjà en vue soi-même, mais d’une manière plus humble, plus sûre, plus favorable au coup d’œil, et comme quelqu’un de la foule : c’est le meilleur moyen d’en sortir ensuite avec son butin, et de dire un jour à quelque ridicule, à quelque vice pris sur le fait : Le voilà !